reden.arpa-docs.ch Rektorats Reden © Prof. Schwinges
Textbreite
Schriftgröße
Kapitel 

ALLOCUTION DU RECTEUR

M. le professeur Eugène BUJARD
A LA SÉANCE DU DIES ACADEMICUS
du mercredi 9 juin 1943.
Mesdames, Messieurs,

IL y a un siècle, Genève connut une période d'agitation causée par le heurt des idées politiques et des aspirations sociales, avant qu'elle ait trouvé le nouvel équilibre sur lequel s'est construite la Genève moderne.

Quelques professeurs de l'Académie jouèrent à ce moment un rôle politique en vue, et participèrent activement à l'élaboration de lois nouvelles, plus spécialement à la rédaction des lois sur l'instruction publique. Parmi eux une figure domine cette période, qui marque la fin de l'ère académique ouverte par le rectorat de Jean-Robert Chouet en 1679.

Cette figure est celle d'Auguste de la Rive qui fut nommé professeur de physique en 1823 à l'âge de 22 ans, qui fut secrétaire du Corps académique de 1825 à 1836, deux fois recteur de 1837 à 1840 et de nouveau de 1843 à 1844, il y a cent ans. C'est ainsi que pendant vingt ans, il exerça une influence prépondérante à l'Académie et dans les conseils du pays.

L'influence de Jean-Robert Chouet, premier recteur laïque, sur l'évolution de l'Académie a été rappelée l'année dernière par M. le professeur Eugène Pittard; Jean-Robert Chouet apportait la philosophie cartésienne et le goût de l'investigation scientifique; il préparait ainsi l'éclosion de la science genevoise, qui allait s'épanouir dès 1744 avec la lignée des grands naturalistes.

L'oeuvre d'Auguste de la Rive est différente. C'est celle d'un législateur, ambitieux pour l'Académie, dont il était un des membres les plus actifs, désireux de lui conserver le lustre qu'elle avait acquis et de lui attribuer tous les rôles auxquels il croyait qu'elle pouvait prétendre. C'est ainsi qu'il fut l'instigateur de la revision des lois sur l'instruction publique et qu'il

travailla à la laïcisation de la Haute Ecole. La loi de 1835, qui soustrayait l'Académie au contrôle de l'Eglise et la mettait à la charge de 1'Etat, est véritablement une «loi de la Rive», le secrétaire du Corps académique ayant eu une influence décisive dans son élaboration. Cette loi et les règlements de 1839, oeuvres aussi d'Auguste de la Rive, donnaient à l'Académie une prépondérance très grande dans l'instruction publique et lui attribuaient le contrôle de tout l'enseignement secondaire.

Cette prépondérance accordée à l'Académie suscita bien des résistances; l'activité politique d'Auguste de la Rive, élu recteur en 1837, en provoqua d'autres et l'Académie en souffrit dans son ensemble, quoiqu'elle ait essayé de rester en dehors des débats.

Ce n'est ni le lieu, ni le moment de refaire l'histoire de cette époque; il suffit d'y relever l'opposition de deux conceptions sur la valeur et la mission de l'Académie, opposition d'idées qui est encore singulièrement actuelle aujourd'hui.

Pour certains des adversaires d'Auguste de la Rive, l'Académie n'est rien de plus qu'une école supérieure faite pour donner à l'Eglise, au barreau ou à l'enseignement secondaire, des ministres, des avocats ou des maîtres qualifiés; dans ce rôle, elle n'est pas un corps indépendant, mais un corps subordonné, comme l'écrivait un des principaux pamphlétaires, reprenant ainsi la conception napoléonienne de l'Université.

Auguste de la Rive avait une toute autre idée de la valeur de l'Académie; il voyait en elle un corps de savants, ayant pour mission de contribuer au progrès de la science et jouissant pour cela d'une grande autonomie.

Aujourd'hui encore certains esprits, même parmi les intellectuels, n'envisagent-ils pas quelquefois l'Université sous cet angle étroit de la préparation professionnelle? alors que sa mission est plus et mieux, puisqu'elle est aussi de défendre les valeurs spirituelles et de se consacrer à la recherche de la vérité. Or, pour remplir cette mission, l'Université a besoin d'une large autonomie; elle doit jouir de certaines libertés.

Ces libertés, nos universités suisses ont le privilège d'en bénéficier; notre Université tout particulièrement, puisqu'elle peut reconnaître dans le chef du Département de l'instruction

publique un esprit universitaire, qui a le souci de laisser à l'Université toute l'autonomie compatible avec les obligations de l'Etat et qui n'a pas craint de dire un jour, comme on l'a déjà rappelé dans une cérémonie semblable: «l'Université a besoin de libertés».

C'est là un privilège immense aujourd'hui, lorsque nous pensons au sort de tant d'autres universités; mais ce privilège nous devons nous en montrer dignes, professeurs comme étudiants, par la fidélité à l'esprit universitaire et le désintéressement à l'égard de la recherche scientifique et de la vérité.

Mes chers Collègues, Mesdames et Messieurs,

Nécrologies. — Un recteur connaîtra-t-il une fois la joie de pouvoir présenter son rapport annuel sans avoir à rappeler la mémoire de disparus? Je ne le pense pas. Cette année encore l'Université a été frappée douloureusement par une série de deuils.

Le premier acte du recteur entrant en charge fut d'assister aux obsèques du professeur Charles-Eugène Guye, décédé le 15 juillet 1942. Descendant d'une famille neuchâteloise, Charles-Eugène Guye était né le 15 octobre 1866 dans le domaine familial de Saint-Christophe, près d'Yverdon. Sa famille étant venue s'établir à Genève, il fit ses humanités au Collège de Saint-Antoine et ses sciences à notre Université. Elève de Jaques-Louis Soret et de Charles Soret, il couronna ses études de physique par une thèse sur la polarisation rotatoire. Il partit ensuite pour Zurich, afin de s'y perfectionner dans les problèmes d'électrotechnique; il y devint bientôt professeur agrégé et chargé de cours à l'Ecole polytechnique fédérale.

C'est là que Genève vint le chercher, en 1900, pour succéder à son maître Charles Soret. Charles-Eugène Guye fut à la fois un grand physicien et un grand philosophe. Il appartient à plus compétent que moi de dire ce que fut le physicien; son oeuvre a été magistralement exposée, le 13 octobre, par notre collègue,

M. le professeur J. Weigle, au cours de la séance commémorative organisée par la Section des sciences naturelles et mathématiques de l'Institut national genevois. Je me contenterai donc de rappeler la pensée biologique du philosophe préoccupé avant tout des problèmes de la vie.

Ses travaux de biophysique ont été réunis en un volume sous le titre: «Evolution physico-chimique», dont la seconde édition est sortie de presse en avril 1942, quelques semaines avant sa mort. Charles-Eugène Guye y conduit le lecteur sur les «Confins de la physique et de la biologie»; il montre que le déterminisme rigoureux des lois physiques n'est qu'une illusion macroscopique due à la sommation d'un grand nombre d'actions individuelles, «parmi lesquelles se cache vraisemblablement le secret de la vie et de la pensée».

En 1930, se sentant fatigué, Charles-Eugène Guye avait renoncé à son enseignement pour se consacrer plus complètement à ses méditations; il fut nommé professeur honoraire. Il nous reste de lui le souvenir d'un maître affable et modeste qui fut en réalité «un des esprits les plus puissants et les plus clairvoyants de notre époque», selon l'éloge que lui décerne M. Lecomte du Nouÿ.

Charles-Eugène Guye a laissé à l'Université un legs créant un prix pour encourager les recherches de physique. Cette générosité est venue s'ajouter à celle qu'il avait eue, en 1939, en instituant le prix Philippe-Auguste Guye, en mémoire de son frère le savant professeur de chimie théorique.

Je fais hommage de la gratitude de l'Université à la mémoire de notre collègue.

Quelques semaines plus tard, un deuxième deuil frappait l'Université; le 8 août 1942 s'éteignait subitement le professeur Guglielmo Ferrero, au Mont-Pèlerin, où il était en séjour.

Il était né à Portici, au pied du Vésuve, le 31 juillet 1871. Après avoir étudié le droit à Florence, il devint à Turin l'élève, puis le gendre, de César Lombroso, le grand criminaliste italien. Docteur en droit, Guglielmo Ferrero compléta sa formation par un voyage qui le conduisit en France, en Allemagne, en Angleterre

et en Russie. Il en rapporta des essais de sociologie et de psychologie ethnique où il exprimait, après Gobineau, la théorie de la décadence des races.

Une nouvelle évolution orienta le sociologue vers l'histoire et il publia, de 1906 à 1910, sa monumentale étude sur la «Grandeur et la décadence de Rome», qui lui valut sa renommée universelle. Ayant quitté l'Italie pour des raisons politiques, il visita l'Argentine et les Etats-Unis, puis il revint se fixer à Paris. C'est alors que Ferrero fut appelé par le Conseil d'Etat, en 1931, comme professeur ordinaire d'histoire contemporaine. Ses talents de conférencier lumineux et entraînant attirèrent un nombreux public à ses leçons sur Napoléon, sur la Révolution française et sur l'Empire.

La Faculté des lettres a tenu à honorer la mémoire du maître trop tôt disparu, en organisant, le 3 mai dernier, une séance commémorative qui eut lieu à 1'Aula de l'Université. M. le professeur André Oltramare parla de l'humaniste et dans un brillant exposé il montra comment chez Guglielmo Ferrero l'accord entre la passion et l'intelligence témoigne d'un tempérament de la Renaissance.

Economiste et sociologue, Ferrero sut intuitivement s'identifier à la vie des masses et il réussit à la faire revivre dans ses livres, grâce à son don incomparable d'évocateur; son oeuvre magistrale sur Rome renouvela l'histoire et fut à l'origine du mouvement moderne qui domine les sciences historiques.

M. Luc Monnier, privat-docent, parlant du maître et de l'historien, a rendu ensuite le témoignage émouvant d'un disciple à son maître; il a rappelé l'amitié que Ferrero professait pour notre pays et notre cité devenue se seconde patrie.

Mme Guglielmo Ferrero-Lombroso a remis à l'Université pour être déposés à la Bibliothèque publique et universitaire le moulage du masque et celui de la main de notre regretté collègue. Nous lui exprimons notre reconnaissance pour ces précieux souvenirs et nous l'assurons de la très grande sympathie de l'Université.

Le Dr Emile Thomas n'appartenait pas ou plutôt n'appartenait plus au corps professoral de l'Université; il avait

renoncé depuis bien des années à son enseignement en qualité de privat-docent de médecine interne; cependant ses attaches avec l'Université sont restées étroites du fait de ses fonctions de président des examens fédéraux de médecine pour Genève. Il était né à Genève, le 15 novembre 1860, et sa vie fut consacrée essentiellement à l'exercice de la médecine; il fut pendant quarante-deux ans le médecin du corps des pompiers et pendant vingt ans le médecin-conseil de la Ville. Mais à côté de ses préoccupations de médecin praticien, il avait conservé la curiosité du savant et le goût de la recherche scientifique; il explora plusieurs domaines de la pathologie et de la thérapeutique; fervent alpiniste, il expérimenta à plusieurs reprises au laboratoire du Jungfraujoch et consacra une étude au mal de montagne. Avec l'âge, Emile Thomas se tourna vers le passé et publia plusieurs mémoires sur l'histoire de la médecine à Genève au XIXe siècle.

Le Dr Emile Thomas est décédé le 13 juillet 1942, après une vie de travail mise au service de la médecine et du pays.

L'Université a perdu trois de ses docteurs honoris causa.

Edouard Favre, né en 1855, est décédé le 8 juin 1942, après une longue vie consacrée toute entière au bien du pays. En 1929, l'Université, sur la proposition de la Faculté des lettres, avait voulu honorer l'éminent historien en le proclamant docteur ès lettres honoris causa. Ses nombreux mémoires traitent pour la plupart de chapitres de l'histoire de la Suisse ou de Genève. Durant la guerre de 1914-18, il s'était occupé de l'internement des prisonniers en Suisse.

Deux jours plus tard, le 10 juin, disparaissait à son tour Georges Navazza; né en 1860, il s'était voué très jeune au barreau où il se fit apprécier par son éloquence et son argumentation précise. En 1897, il était appelé aux fonctions de procureur général qu'il exerça pendant vingt-sept ans. L'Université lui avait conféré le grade de docteur en droit honoris causa à l'occasion du 25me anniversaire de sa nomination. Il laisse le souvenir d'un homme qui fut un exemple dans la consécration au devoir.

Nous avons encore appris le décès de William-Henry Young,

survenu le 7 juillet 1942. Le grand mathématicien de la Royal Society de Londres avait reçu, le 24 juin 1913, le doctorat honoris causa ès Sciences mathématiques de l'Université, sur la proposition de la Faculté des sciences.

J'ai aussi le regret de signaler le décès de trois de nos étudiants:

Mlle Jeanne Laverrière et M. Jean Zurbrügg appartenaient à la Faculté de médecine; le dernier est mort au service militaire.

M. Georges Morel était inscrit à la Faculté de droit.

Nous exprimons à leurs familles la sympathie de l'Université.

Démissions. — Deux professeurs ont quitté notre Maison. Le professeur Ernest Métral a pris une retraite bien méritée après cinquante ans d'enseignement; il avait été nommé, en 1892, chargé de cours à l'Ecole dentaire et promu professeur ordinaire en 1893. Ses nombreux élèves et amis ont pris congé de lui le 2 juillet dernier, par une modeste cérémonie qui eut lieu à l'Institut de médecine dentaire. Les voeux de l'Université l'accompagnent dans sa retraite.

Le professeur Paul Logoz, vice-recteur, a été appelé à siéger au Tribunal fédéral. Autant l'Université est flattée de l'honneur qui a été fait à l'un de ses maîtres, autant elle sent la perte qu'elle éprouve en celui qui occupa avec distinction, depuis 1919, successivement la chaire de droit commercial, puis celle de droit pénal. Le 13 mars 1943, une manifestation de sympathie a réuni, autour du nouveau juge fédéral, le corps professoral, le corps judiciaire et de nombreux amis; par la voix du doyen de la Faculté de droit, l'Université a adressé à notre collègue ses félicitations pour sa belle carrière et lui a dit toute sa reconnaissance pour les nombreux services qu'il lui a rendus.

Le professeur Paul Logoz a voulu témoigner de son attachement à notre maison par une généreuse donation, en instituant la bourse Alfred Gautier, destinée à favoriser les études de droit pénal. Nous avons reconnu à ce geste l'intérêt profond que conserve notre collègue pour l'Alma Mater qu'il a servie pendant vingt-quatre ans et nous lui en exprimons notre sincère gratitude.

M. William Dunand, élu juge d'instruction, a dû renoncer à l'enseignement de procédure civile allemande, qu'il donnait en qualité de chargé de cours.

Manifestations jubilaires. — Plusieurs professeurs ont été aussi l'objet de témoignages de reconnaissance et de manifestations de sympathie.

Le 5 juin 1942, l'Université s'est assemblée autour de M. le professeur Eugène Pittard, recteur en charge, pour lui témoigner de son affection à l'occasion de son anniversaire. Le vice-recteur lui a dit l'admiration de ses collègues pour son oeuvre scientifique et lui a présenté les félicitations du corps professoral. Après que M. Adrien Lachenal lui eut fait part de la gratitude du gouvernement, plusieurs collègues et amis de Suisse et de Genève ont encore apporté leurs voeux au jubilaire.

Je suis heureux de pouvoir lui exprimer à nouveau, et cette fois publiquement, notre reconnaissance pour le magnifique recteur qu'il a été et pour l'enthousiasme qu'il a toujours mis au service de l'Université et du pays, aussi bien comme professeur que comme doyen de la Faculté des sciences et comme recteur.

Le 30 juin suivant, la médaille universitaire a été offerte à M. Eugène Borel, professeur honoraire, le jour anniversaire de ses 80 ans; l'Université a voulu par ce geste honorer l'éminent juriste du droit international.

Le 27 mars 1943, l'Université a saisi l'occasion qui lui était offerte par la réunion, tenue à Genève, de la Société suisse de zoologie pour adresser, par la voix du recteur, ses félicitations à M. le professeur Emile Guyénot, qui dirige depuis 25 ans l'Institut de zoologie de la façon brillante et féconde que vous savez.

Le 3 mai, quelques collègues, de nombreux amis et élèves se sont réunis à l'Aula de l'Ecole de médecine pour remettre à M. le professeur J.-A. Weber un don collectif à l'occasion de la vingt cinquième année de son enseignement à Genève; ce don est venu enrichir le Fonds pour l'Institut d'anatomie normale, créé l'année précédente.

Le 8 mai, la Faculté des lettres a célébré le trentième anniversaire du professorat de M. Albert Malche. Le doyen de la

Faculté des lettres a retracé en termes excellents la carrière du jubilaire et montré qu'elle fut celle d'un grand éducateur et d'un genevois authentique. Après que M. Adrien Lachenal eut complimenté, en ami, le jubilaire, le recteur a présenté à M. le professeur Albert Malche les félicitations de l'Université et il a rappelé le rôle qu'il a joué dans le développement de l'Institut Jean-Jacques Rousseau et dans le rattachement de celui-ci à la Faculté des lettres sous le nom d'Institut des sciences de l'éducation. M. le professeur Bovet, au nom de cet institut, et d'autres amis de Suisse et de Genève ont joint leurs témoignages de gratitude et leurs voeux à ceux déjà exprimés.

L'Université a encore honoré la mémoire de deux anciens collègues en inaugurant leurs bustes érigés dans le hall.

Le 2 juillet, le recteur recevait le buste de Charles Borgeaud, l'éminent écrivain de l'histoire de l'Université de Genève, dont les trois volumes sont un magnifique hommage rendu à notre Alma Mater. Ce buste, fort ressemblant, est dû au talent du sculpteur Jules Trembley.

Le 20 octobre, le recteur inaugurait l'effigie de Max Askanazi, due au ciseau de l'artiste qu'est Maurice Sarkissof; les amis du pathologiste universellement connu avaient fixé cette cérémonie au jour anniversaire de la mort de celui qui fut l'un des maîtres les plus remarquables de la Faculté de médecine.

Nous remercions les donateurs de ces deux monuments, qui perpétueront le souvenir physique de ces deux collègues que notre mémoire n'oubliera jamais.

Nominations. — Plusieurs nominations sont venues enrichir nos facultés:

Ont été nommés professeurs ordinaires:

M. Ervin Rutishauser, jusqu'ici professeur extraordinaire de pathologie générale et d'anatomie pathologique;

M. Jean Graven, appelé à succéder au professeur Paul Logoz dans la chaire de droit pénal, de procédure pénale et de procédure civile;

M. Walter Yung, précédemment professeur extraordinaire de droit civil suisse;

Ont été nommés professeurs extraordinaires:

M. Arthur-Jean Held, qui succède au professeur Ernest Métral dans la chaire d'art dentaire conservateur;

M. Samuel Baud-Bovy, jusqu'ici chargé du cours de langue et de littérature grecques modernes;

M. Edouard Paréjas, de retour d'istanbul où il a professé pendant six ans, enseignera la géologie spéciale;

M. Luigi Carozzi, dont la compétence en maladies professionnelles est connue de chacun;

M. Léopold Boissier, actuellement chargé de cours de droit constitutionnel comparé.

Ont été nommés chargés de cours:

M. Luc Monnier pour l'histoire du XVIÏIe siècle et pour l'histoire contemporaine;

M. Fernand Reyrenn pour le séminaire de législation fiscale;

M. Pierre Balavoine pour l'analyse des denrées alimentaires.

M. Edouard Poldini pour la géo-physique appliquée.

Plusieurs privat-docents ont été agréés par l'Université, ce sont:

A la Faculté des sciences, M. Félix Fiala.

A la Faculté des lettres, Mme Mélanie Stiassny et M. Ernest Stein.

A la Faculté des sciences économiques et sociales, Mme Marguerite Lobsiger-Dellenbach, MM. Manlio Sancisi et Aldo Dami;

A la Faculté de droit, MM. Edmond Gay et Auguste-Reynald Werner.

A la Faculté de médecine, M. Aimé Baumann.

Nous renouvelons nos souhaits de bienvenue à tous ces nouveaux collègues.

Le départ du professeur Paul Logoz, vice-recteur, a entraîné quelques modifications dans la composition du bureau; M. le professeur Antony Babel a été élu vice-recteur et M. le professeur Claudius Terrier l'a remplacé en qualité de doyen à la tête de la Faculté des sciences économiques et sociales.

D'autre part, M. le professeur François Pfaeffli a été nommé président du Collège des professeurs de l'Institut de médecine dentaire; le président de ce collège siège à la Faculté de médecine et sert d'agent de liaison entre l'Institut et celle-ci.

Quelques changements sont survenus aussi dans le corps des fonctionnaires de l'Université; M. Joseph Gex, ayant atteint la limite d'âge, a quitté notre service; il a été remplacé dans ses fonctions d'huissier par M. Oscar Wahli et M. Raymond Lacroix a été nommé appariteur.

Etudiants. — Le nombre des étudiants inscrits dans nos six facultés a augmenté d'une façon réjouissante; il était de 1.385 pour le semestre d'hiver, à fin mars; les statistiques ne sont pas complètes pour le semestre d'été, mais elles ne sont pas moins satisfaisantes déjà aujourd'hui.

Il faut remonter à près de trente ans en arrière, jusqu'en 1914, à la veille de la première guerre mondiale, pour retrouver une affluence plus grande. Cependant la composition de notre population estudiantine est bien différente de ce qu'elle était autrefois. En 1914, les étrangers représentaient le 80%de nos effectifs; la moitié de ces étrangers étaient des slaves; il y en avait plus de 600 à la seule Faculté de médecine. Aujourd'hui, par suite des circonstances politiques mondiales, les étrangers ne représentent plus que le 27% des étudiants inscrits.

Ceci a profondément changé l'aspect des auditoires de nos facultés, particulièrement dans les Facultés de droit et de médecine, pour lesquelles l'apport étranger était le plus important.

Nous nous félicitons particulièrement de constater le nombre croissant des confédérés, qui viennent de tous les cantons alémaniques passer un ou deux semestres chez nous; c'est là une coutume heureuse qui facilite grandement la compréhension réciproque de nos diverses mentalités. La Conférence des recteurs et l'Union nationale des étudiants suisses se préoccupent de faciliter encore cet échange d'étudiants entre nos universités.

Dans chacune des universités tous les étudiants sont groupés en une Association générale dont l'action s'est surtout portée

cette année du côté de l'entr'aide internationale. Emus de la profonde misère d'un grand nombre de leurs camarades victimes de la guerre, les membres du comité de l'Association générale de Genève se sont ingéniés à trouver les moyens nécessaires pour porter secours à ces victimes; ils ont reçu l'autorisation du Bureau de faire vendre à la caisse de l'Université un timbre de bienfaisance qui a obtenu un légitime succès. Il a été acheté par près des 96% des étudiants et il a rapporté la belle somme de 2.500 francs environ. Nous félicitons chaleureusement nos étudiants de leur charité active et nous les assurons qu'ils trouveront toujours auprès des autorités universitaires l'appui qui leur sera nécessaire.

Nos étudiants ont aussi porté leur effort d'entr'aide sur le terrain national et une quarantaine d'entre eux, jeunes gens et jeunes filles, se sont inscrits l'été dernier comme volontaires pour l'aide à l'agriculture; ce printemps vingt-quatre ont répété le même effort.

Les taxes générales auxquelles sont soumis tous les étudiants ont été augmentées sur deux postes; il est perçu une cotisation nouvelle en faveur des sports et il a été institué une taxe d'assurance accidents.

Le succès de la bicyclette et la fréquence des accidents de la route ont engagé l'Université à assurer tous les étudiants contre les accidents. Jusqu'à hier, seuls les étudiants des Facultés des sciences et de médecine étaient assurés contre les accidents survenus dans les laboratoires; dorénavant, en payant une prime de 2 fr. 50 par semestre, tous les étudiants seront assurés non seulement contre les accidents qui peuvent leur survenir dans les locaux universitaires, mais aussi contre ceux qui pourraient les atteindre au cours d'excursions ou de visites d'usines sous la direction d'un professeur et encore contre les accidents de route, sur le trajet qui va de leur domicile à l'un des bâtiments de l'Université. C'est là un progrès utile, croyons-nous.

Enseignements et conférences. — Une des qualités essentielles d'un organisme vivant est d'être capable de s'adapter aux contingences variables de son milieu par des changements dans son comportement et ses diverses manifestations vitales, sans

que ces morphoses retentissent cependant sur son soubassement génétique qui jouit d'une sorte de pérennité. Il en est de même d'une Université véritablement vivante; elle est soumise, elle aussi, à ces mêmes lois inéluctables de la biologie; tout en gardant fidèlement sa tradition, elle doit participer à la vie quotidienne; aussi ne faut-il pas s'étonner mais se réjouir des modifications incessantes apportées, année après année, à ses enseignements et à ses règlements.

Durant l'année universitaire qui s'achève quatre enseignements nouveaux ont été créés. Ce sont:

Un enseignement de législation fiscale avec un séminaire et une chaire de théorie mathématique et de technique des assurances, à la Faculté des sciences économiques et sociales. Le premier répond à un désir exprimé par le Département fédéral des finances, en raison de la complexité des problèmes fiscaux qui étreignent de plus en plus la vie nationale, le second aux préoccupations de notre époque où les assurances sociales ont pris un développement que l'on n'aurait pu soupçonner naguère. A propos de cette dernière création, il faut souligner qu'elle est le fruit de l'étroite collaboration de deux facultés, des économistes et des mathématiciens.

Un enseignement de géophysique appliquée, à la Faculté des sciences, complètera la préparation de nos ingénieurs prospecteurs, qui sont appelés à ausculter notre sol pour en mieux comprendre la structure et le développement et pour en déceler les richesses.

Un cours sur les maladies professionnelles à la Faculté de médecine répondra à ce souci de protéger toujours plus efficacement l'ouvrier contre les dangers qu'il peut courir dans l'exécution de son travail.

La Faculté des lettres a étudié une réorganisation de l'enseignement de l'histoire, dont la mise au point sera achevée le semestre prochain, après la nomination du successeur de M. le professeur Ferrero.

C'est ici le lieu de signaler la convention qui vient d'être signée entre la Ville, l'Etat et l'Université et qui a pour but de coordonner les divers services botaniques de la Ville et de

l'Université en vue d'une rationalisation de leur administration et d'un accroissement de leur rendement scientifique.

Aux termes de cette convention, l'Etat transfert à titre de dépôt dans les collections de la Ville l'herbier Boissier, dont l'Université est propriétaire. Le directeur des herbiers et du jardin botanique, nommé par la Ville avec l'agrément de l'Université et de l'Etat, devient professeur extraordinaire de botanique systématique.

La Ville met à la disposition de l'Université un terrain, des serres et un jardinier pour la création d'une station de botanique expérimentale, sous la direction du professeur de botanique générale.

L'Université se félicite de cet accord entre l'Etat et la Ville, car il permettra de donner un nouvel essor à la botanique, cette science essentiellement genevoise, qui fut illustrée par les de Candolle, les Boissier, les Briquet, les Robert Chodat, pour ne citer que les disparus.

Signalons encore que le 9 octobre, le recteur a représenté l'Université à la cérémonie d'ouverture de la Haute école d'architecture, dont les élèves doivent être immatriculés à l'Université, en vertu de conditions transitoires spéciales, afin d'y suivre les cours nécessaires à leur culture générale.

Il paraît vraisemblable que tôt ou tard cette Haute école pourra être rattachée plus étroitement à l'une de nos Facultés sous la forme d'un Institut universitaire.

Cependant une Université ne peut être un organisme autarcique, qui se suffit à lui-même; elle a besoin des apports du dehors pour vivifier son activité. C'est pourquoi l'Université a été heureuse de s'assurer la collaboration ou de recevoir la visite de plusieurs professeurs ou conférenciers de l'étranger. Nos étudiants et le public genevois ont tiré le plus grand profit des exposés magistraux qu'ils ont eu le privilège d'entendre.

M. le professeur Henri Guillemin, de Bordeaux, a fait, dans le cadre de la Faculté des lettres, une série de huit leçons consacrées à «deux années de la vie de Jean-Jacques Rousseau».

M. le professeur Jean Atanasiu, doyen de la Faculté des sciences à Bucarest, a fait deux intéressantes conférences sur

l'origine et la propagation des tremblements de terre, qui périodiquement secouent le sol de son pays.

M. le professeur Zoltan Baranyai, de Kolosvar, a exposé dans un saisissant raccourci l'histoire des relations diplomatiques de la France et de la Hongrie, du XVIe au XVIIIe siècle.

M. le professeur Georges Opresco a présenté de savantes introductions à l'exposition de l'Art paysan roumain que l'on peut admirer au Musée Rath.

Enfin M. le professeur D. Caracostea, de Bucarest, a démontré devant l'Ecole d'interprètes l'expressivité de la langue roumaine, et dira après demain la place occupée par la littérature de son pays dans les littératures romanes.

L'Université exprime sa gratitude à ces éminents collègues; elle se réjouit de ces visites qui maintiennent et ravivent de très anciens liens intellectuels et laissent espérer un renouveau des valeurs spirituelles communes à l'humanité, lorsqu'aura cessé l'effroyable tragédie à laquelle nous assistons impuissants.

Dans son rapport de l'année dernière, mon prédécesseur, M. Eugène Pittard, avait annoncé l'institution de la fondation Marie Grettler en faveur des études de philosophie et d'orientalisme et à l'avantage des Universités de Zurich et de Genève. Cette année, notre Ecole a pu bénéficier pour la première fois de ces généreuses dispositions. Sous les auspices de cette fondation, M. le professeur Charles Werner a fait à l'Université de Zurich une série de conférences sur «le problème du mal» et nous avons eu le privilège d'entendre récemment quatre exposés, tous remarquables, de M. le professeur Emile Abegg, le Zurich, sur «la philosophie hindoue».

La bibliothèque de Mlle Marie Grettler est aujourd'hui installée à la Bibliothèque publique et universitaire.

La Faculté des sciences économiques et sociales, en collaboration avec la Société d'histoire et d'archéologie et plusieurs autres sociétés savantes genevoises, a célébré le 18 février 1943, par une cérémonie publique tenue à l'Aula de l'Université, le centenaire de la mort de Sismondi (1773-1842), l'historien de valeur et l'économiste de talent que Genève s'honore de compter parmi les citoyens qui ont illustré son nom. MM. les professeurs Jean de Salis, de l'Ecole polytechnique fédérale,

Antony Babel et William Rappard ont rappelé, chacun à leur tour, ce que fut l'homme et l'historien, l'économiste et le réformateur social et quel fut le rôle de Sismondi dans la Genève du début du XIXe siècle. Les discours prononcés dans cette cérémonie ont fait l'objet d'un fascicule, le volume V des publications de la Faculté des sciences économiques et sociales.

La Faculté de médecine a organisé, du 5 au 10 octobre 1942, un cours de perfectionnement sur le thème «glandes endocrines et vitamines». Ce cours a connu un succès très vif; il a été suivi par environ deux cents médecins, dont un tiers de confédérés venus de quatorze cantons; plusieurs soirées ont été consacrées à des discussions sur les sujets exposés dans la journée. Le recteur se réjouit de ce succès et félicite la Faculté de médecine et son doyen de cette utile initiative, qui sera renouvelée, nous le souhaitons. Les quelques quarante leçons données à cette occasion ont paru en un volume qui se trouve actuellement en librairie.

Règlements. —Au cours de cette année, notre école a terminé la codification de la partie générale de son règlement et elle a modifié quelques-uns des règlements de ses Facultés. En voici les innovations les plus importantes.

La Faculté des sciences économiques et sociales a instauré trois licences nouvelles, celles des sciences géographiques avec et sans mention mathématique et celle des sciences économiques et actuarielles. Les premières assureront une meilleure préparation des futurs maîtres de géographie; la seconde donnera une culture économique générale à ceux des mathématiciens qui se sentent attirés par la technique des assurances.

La Faculté de médecine a créé des diplômes de spécialistes. Les suisses porteurs du diplôme fédéral sont astreints à faire un stage prolongé avant d'être autorisés à porter le titre de spécialistes, mais ce stage n'est pas sanctionné par des examens permettant de juger des connaissances spéciales du candidat; les étudiants étrangers manifestent fréquemment le désir d'emporter de chez nous, comme ils pouvaient le faire de plusieurs universités étrangères, un certificat attestant qu'ils avaient acquis des connaissances précises dans le domaine de la spécialité qu'ils

ont choisie. C'est à ce double besoin que répondent les nouveaux diplômes.

La Faculté autonome de théologie a mis au point son règlement qui pourra être réimprimé comme l'ont déjà été ceux des autres facultés dont la revision est maintenant achevée.

Dons. — L'Université a été l'objet cette année encore de plusieurs libéralités et d'un don princier.

J'ai rappelé tout à l'heure le legs du professeur Charles-Eugène Guye créant un prix de physique et la donation de M. le professeur Paul Logoz instituant la bourse Alfred Gautier en faveur des études de droit pénal. Je dois y ajouter:

Le prix Edouard Folliet, créé par notre collègue à l'occasion de ses quarante ans d'enseignement à l'Ecole de commerce et à l'Université; ce prix est destiné à récompenser une étude d'économie ou de technique commerciales.

Le recteur remercie nos collègues de leur générosité envers nos Facultés de droit et des sciences économiques et sociales.

Notre profonde gratitude va encore à MM. Raoul Perret et Louis Berthoud, qui viennent de créer un fonds et une bourse en faveur de la Faculté des sciences économiques et sociales; le fonds portera le nom de Fonds «Universal». selon le désir des donateurs. Nous apprécions très particulièrement ce geste généreux des directeurs d'une importante fabrique d'horlogerie de notre pays et nous y voyons un heureux augure pour l'avenir de l'Université, qui doit pouvoir s'appuyer sur notre population tout entière pour remplir le rôle qui lui est dévolu vis-à-vis du pays.

La même société «Universal» a remis à l'institut de géologie une somme de 2.000 francs pour faciliter l'impression de ses thèses de doctorat, et 500 francs à la Faculté des lettres.

J'en viens maintenant au don que nous a fait M. John Rockefeller junior de la Campagne Rigot, à Varembé. La maison Rigot, construite peu après 1763, est un bel exemple de cette architecture du XVIIIe siècle qui peupla notre campagne genevoise de tant de maisons bourgeoises remarquables; elle est cataloguée dans les écrits consacrés aux trésors architecturaux de notre pays. Au début du XVIIIe siècle, le domaine de Varembé était propriété du syndic et diplomate François Pictet (1667-1749).

Isaac-Robert Rilliet-Fatio l'acquit en 1763 et fit construire la maison que nous admirons encore aujourd'hui. Au début du XIXe siècle, le domaine échut à Mme Jean-Amédée-Samuel Rigot, née Finguerlin; il resta dans la famille Rigot jusqu'à nos jours. Grâce à la générosité de M. J. Rockefeller vis-à-vis de l'Université, nous sommes assurés aujourd'hui de la conservation de ce monument de cette Genève du XVIIIe siècle, qui brilla d'un si vif éclat dans le monde scientifique. Il convient de rappeler ici le don généreux de la Fondation Rockefeller en 1927, qui permit la construction de la station de zoologie expérimentale et les libéralités de cette Fondation vis-à-vis de l'Institut de hautes études internationales.

L'Université a témoigné de sa grande reconnaissance à M. John Rockefeller junior par l'envoi d'une adresse.

Une seconde adresse a été remise à M. Arthur Sweetser, haut fonctionnaire de la Société des Nations, un ami de Genève, qui fut l'instigateur de la donation Rockefeller à l'Université.

La destination de la Campagne Rigot n'a pas encore été précisée. Les salons du rez-de-chaussée, ornés de boiseries blanches sur fond bleu ou vert tendre, seront sans doute conservés comme salons de réception. Le parc sera en partie aménagé en terrain de sports de l'Université, aménagement qui respectera les beaux ombrages du domaine, en particulier la superbe rangée d'arbres de l'entrée principale. Cependant, les travaux nécessaires ne pourront être exécutés que dans l'après-guerre, car les terrains ont été loués pour de petits jardins ouvriers, qu'il est impossible de supprimer dans les circonstances actuelles.

Chose inattendue, presque paradoxale, la générosité de M. J. Rockefeller a mis l'Université dans un certain embarras; comment assurer l'entretien de cette magnifique propriété? En effet, si la valeur totale des Fonds universitaires représente une somme très importante, ces divers fonds —il y en a aujourd'hui cinquante-sept — sont tous, sans exception, affectés par leurs donateurs à des buts précis, prix ou bourses, de telle sorte que l'Université ne possède en réalité aucun capital dont elle puisse disposer dans un but d'intérêt général. Il serait désirable que l'Université puisse constituer un fonds sans affectation définie dont elle puisse utiliser les revenus au mieux des nécessités du

moment. En attendant que ce voeu se réalise, l'Université a trouvé dans l'Etat un régisseur bénévole, qui veut bien lui assurer pour le moment l'entretien du domaine de Varembé. L'Université lui exprime ses remerciements.

Je m'en voudrais de ne pas dire ici à la Société académique notre reconnaissance pour ses nombreuses libéralités et pour tout ce qu'elle fait chaque année afin d'améliorer l'équipement de nos laboratoires et d'enrichir nos bibliothèques.

Education physique et sports. — L'Université a mis au nombre de ses préoccupations les problèmes qui concernent la santé et le développement physique de ses étudiants. Une cotisation semestrielle de 5 francs a été demandée à tous les étudiants, d'entente avec l'Association générale de ceux-ci. Cette cotisation, complétée par une subvention du canton et de la Confédération, a permis de désigner cette année M. Adrien Corbat en qualité de maître des sports de l'Université et divers moniteurs. Elle permettra à l'avenir une extension rationnelle de la culture physique des étudiants et le développement de la pratique des sports. Les principales difficultés auxquelles se heurte cette organisation sont la densité des horaires de nos Facultés et le manque de salles de gymnastique. Il est à souhaiter qu'un jour ou l'autre l'Université puisse posséder sa salle de gymnastique, comme d'autres Universités suisses, et son terrain de sport; ce dernier voeu sera réalisé par l'aménagement de la campagne Rigot, dès que les circonstances le permettront.

Ces besoins se feront d'autant plus pressants que l'Université de Genève, à l'instar de celle de Bâle, organisera à partir de l'automne prochain une série de cours théoriques et de leçons pratiques destinés à la préparation des candidats au diplôme fédéral de maître de gymnastique I; ce diplôme, selon les prescriptions fédérales, deviendra exigible de tous les maîtres de gymnastique des écoles secondaires. Ces cours, qui bénéficieront d'une subvention fédérale, seront groupés en un Institut d'éducation physique et de sports, sous la direction technique du maître de sports et sous le contrôle de la Faculté de médecine.

Informations diverses. — L'Université se doit de participer dans la mesure de ses forces à la vie économique et sociale de

notre pays. Aussi le recteur a-t-il salué avec une vive satisfaction l'initiative prise par les professeurs de l'Ecole de chimie de collaborer à la Maison genevoise, qui avait été placée en cette année du IIme millénaire sous le vocable de «Genève au travail». L'Institut de chimie analytique et de microchimie, dirigé par M. le professeur Paul Wenger, a démontré l'utilité de l'analyse chimique dans les sciences, dans l'industrie et dans les arts, et il a présenté quelques méthodes analytiques récentes.

L'Institut de chimie technique et théorique et d'électrochimie, présidé par M. le professeur Emile Briner, a installé entre autres un modèle réduit des appareils permettant la fabrication de l'acide nitrique au moyen de l'arc électrique. L'Institut de chimie inorganique et organique, dirigé par M. le professeur Kurt Meyer, enfin, a initié le public à quelques-unes des applications des rayons X aux recherches chimiques et il a exposé toute une série de produits synthétiques (colorants, médicaments, etc.). J'ai pu me convaincre que ces diverses démonstrations et les leçons qui les commentaient ont grandement intéressé le public. Le recteur remercie ces collègues de leur initiative qui leur a causé, il le sait, un surcroît de travail, mais qui a permis au public genevois de mieux connaître les travaux qui sont l'objet de recherches quotidiennes dans nos laboratoires.

Je suis heureux d'annoncer que cette année, de nouveau, l'Université collaborera à la Maison genevoise grâce au dévouement de MM. les professeurs Jean Weigle et Eugène Pittard, qui organiseront l'un un stand de physique et l'autre un stand d'anthropologie. Je les en remercie dès aujourd'hui et je ne doute pas qu'ils connaîtront un succès semblable à celui de 1'Ecole de chimie.

Dans ce même ordre d'idées de faire participer le public genevois à la vie de notre Université et de lui faire connaître les méthodes et les travaux de nos divers instituts, le Bureau a décidé d'ouvrir les laboratoires au public dans une série de «Journées universitaires» qui auront lieu cet automne, et dont le programme sera publié en temps utile.

Comme chaque année, l'Université a offert à ses étudiants une soirée de bienvenue. Cette réunion de famille a eu lieu le

14 décembre dans les salons des Amis de l'Instruction. Elle fut agrémentée de quelques tours de prestidigitation du magicien Bengalis, d'un récital de piano où le talent de Mlle Catherine Gris fut particulièrement apprécié, et d'une pièce en un acte «Le Baiser», de Théodore de Banville, qui fut enlevé avec cet entrain et ce sens du lyrisme que nous connaissons chez M. et Mme René Habib. Le recteur remercie tous ces collaborateurs, qui ont pour beaucoup contribué à la réussite de cette soirée.

Nos relations avec la Maison internationale des étudiants ont été empreintes de la cordialité habituelle; à plusieurs reprises elle a mis ses salons à notre disposition pour la réception de nos hôtes. Je remercie Mlle Violette Balmer, M. Guillaume Fatio et leurs collaboratrices de l'aide précieuse qu'ils apportent à l'Université. Le sort de cette Maison internationale des étudiants n'est pas sans nous causer de l'inquiétude. Il serait souhaitable que l'immeuble de la rue Colladon, propriété de la C.I.A., passât par voie d'échanges au domaine de l'Etat et que celui-ci pût alléger les charges d'une maison dont l'Université ne saurait plus se passer. Les locaux du rez-de-chaussée pourraient servir de salles de séminaires, qui font le plus grand besoin à la Faculté des lettres, depuis le développement réjouissant de l'Ecole d'interprètes.

Notre gratitude s'adresse aussi à Mlle Mathilde Gampert, qui dirige avec autant de compétence que de dévouement le Foyer des étudiantes.

Bâtiments. —La pénurie des locaux est une litanie qui revient chaque année dans le rapport du recteur, et mon prédécesseur n'a pas manqué d'attirer l'attention sur ce problème difficile, qui se pose à l'Université avec toujours pins d'acuité.

Il a semblé an recteur actuel qu'il ne suffisait plus de se plaindre mais qu'il était nécessaire d'étudier le problème dans sa généralité et qu'il était urgent de poser quelques principes fondamentaux qui devront diriger à l'avenir la politique d'extension de l'Université. Ces principes peuvent être résumés en quelques mots:

1. Le bâtiment des Bastions doit être réservé exclusivement

aux quatre Facultés des sciences dites morales (lettres, droit, sciences économiques et théologie) et aux services administratifs. Ceci pourra être réalisé par le transfert successif des divers Instituts scientifiques et collections que cet édifice abrite actuellement.

2. L'Ecole de médecine, que le plan d'urbanisme fait disparaître du reste, et l'Institut d'hygiène et de bactériologie devront être transportés au voisinage immédiat des cliniques, ainsi que le prévoit le plan de reconstruction de l'hôpital, qui est actuellement à l'étude. Il sera ainsi créé un véritable quartier médical selon la conception moderne.

3. Une partie des Instituts évacués du bâtiment principal devront être groupés dans le Palais de l'hygiène qui abrite actuellement déjà plusieurs instituts de la Faculté des sciences; ce bâtiment deviendra ainsi une Faculté des sciences. Sur les terrains voisins, qui appartiennent à l'Etat, il faudra construire un Institut de physique, et plus tard une nouvelle Ecole de chimie. Ce groupe d'Instituts constituera un quartier scientifique, qui sera le pendant du quartier médical.

Ces principes ont reçu l'approbation des autorités universitaires et du Sénat; ils ont été transmis aux deux départements de l'Instruction publique et des Travaux publics; ils ont suscité l'intérêt de la Société académique.

Ces projets ne sont que l'expression des besoins futurs de l'Université; ces besoins doivent être satisfaits par étapes successives au cours de la période qui s'ouvre devant nous, si Genève veut que son Université reste vivante et capable de concurrencer les autres Universités suisses, dont plusieurs sont déjà dotées de locaux et d'installations modernes. Cette rénovation progressive des Instituts universitaires doit être comprise dans les vastes projets d'équipement national qui doivent permettre à notre pays d'affronter les difficultés économiques et sociales de l'après guerre.

La première étape de ces transformations est la réfection de l'Aula; les études sont achevées, les plans sont établis et les crédits votés; nous croyons pouvoir dire que le département des Travaux publics se propose d'en commencer l'exécution dès cet été, s'il peut obtenir les matériaux de construction nécessaires.

La réalisation du plan d'extension de l'Université demandera

de longues années et en attendant il faut vivre et satisfaire aux exigences de l'enseignement. C'est pourquoi il a été indispensable de construire en matériaux légers une annexe à l'Ecole de médecine; prise sur la cour, elle abrite les laboratoires de l'Institut de physiologie, tandis qu'une partie des anciens locaux ont été transformés à l'usage de l'Institut de chimie physiologique. Nous espérons pouvoir inaugurer dans quelques jours ces installations nouvelles qui donnent toute satisfaction aux deux professeurs et permettent d'attendre encore plusieurs années cette reconstruction de l'Ecole de médecine, qui est en projet depuis 1914.

Il me reste le très agréable devoir de remercier tous ceux qui ont participé à l'administration de notre Ecole ou qui ont facilité la lourde charge du recteur.

Je réitère en premier lieu l'expression de ma gratitude, et celle de l'Université tout entière, à M. Adrien Lachenal, président du Conseil d'Etat; nous avons toujours trouvé en celui-ci la plus grande compréhension vis-à-vis des besoins de l'Université et nous avons reconnu en lui non seulement un chef, mais un ami de notre Haute Ecole.

Nous n'oublions pas M. H. Grandjean, secrétaire avec qui nous avons eu des relations aussi agréables que fréquentes.

Ma reconnaissance va aussi aux membres du Bureau, auxquels de longues années de collaboration m'ont lié d'affectueuse amitié, et en qui je suis assuré de trouver, à chaque instant, l'aide la plus dévouée pour tout ce qui concerne les intérêts de notre Maison.

Mes chaleureux remerciements vont à M. Hermann Blanc, secrétaire, dont vous connaissez tous le dévouement et sans la collaboration journalière duquel le recteur serait bien empêché de remplir sa mission.

Mes remerciements vont encore à tous les fonctionnaires de l'Université qui accomplissent leur tâche dans des conditions difficiles et qui ne craignent pas de faire bénévolement des heures supplémentaires pour suppléer à l'insuffisance de notre personnel administratif, insuffisance aggravée, à chaque instant, par le départ de l'un ou de l'autre pour une période de relève.

Me voici au terme de ce rapport, trop long à mon gré et au vôtre sans doute, mais il est indispensable qu'en ce jour le recteur puisse exposer les activités diverses de notre Haute Ecole et qu'il puisse renseigner sur ses projets et ses préoccupations d'avenir ce peuple de Genève qui «en consacrant cet édifice aux études supérieures rend hommage aux bienfaits de l'instruction, garantie fondamentale de ses libertés», selon les mots gravés au frontispice de cette maison.