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ALLOCUTION DU RECTEUR

M. le professeur Paul-Edmond MARTIN
A LA SÉANCE DU DIES ACADEMICUS
le 5 juin 1947

LES annales de notre Université s'écrivent selon divers computs chronologiques. Il y a l'année scolaire proprement dite, qui commence le 15 octobre, l'année civile du 1er janvier, qui convient aux redditions de comptes et, pour les rapports du Recteur et des concours académiques — qui eux obéissent à une tradition qui nous appartient en propre —le point d'arrivée et de départ du 5 juin, jour de l'inauguration solennelle de l'Université et Collège de Genève en 1559.

Les faits, dont le récit détaillé nous retiendrait trop longtemps et que je vais m'efforcer de vous présenter selon leur signification, remontent donc au rectorat de M. le professeur Antony Babel. Jusqu'au 15 juillet leur rythme ne s'est point ralenti et les vacances mêmes ont multiplié les signes annonciateurs d'une époque de grande affluence, ce qui voulait dire pour l'Université de grandes responsabilités. La correspondance arrivée à notre secrétariat, les démarches dont il était l'objet, les visites et les demandes de renseignements, tout faisait présager une rentrée sensationnelle par le nombre des hôtes de l'Université de Genève. Et cela commençait par les Cours de Vacances dirigés, sous le contrôle expert de M. le professeur Alexis François, par M. Paul Collart, et qui ont atteint en quatre séries le chiffre record de six cents participants. Tout de suite on put se rendre compte qu'il ne s'agissait pas seulement d'enregistrer de réjouissantes statistiques, mais que cette augmentation quantitative de nos étudiants réclamait des soins multipliés, une adaptation des enseignements à des besoins divers et nouveaux, des aménagements de nos installations, un peu anciennes pour des services assez lourds, en un mot la préparation

d'un travail de qualité qui ne succombât pas sous le nombre, mais au contraire le domine et l'entraîne.

A la fin des vacances, M. Paul Collart a organisé un cycle de cours surtout destinés aux étudiants américains de l'Université de Delaware, qui devait être pour eux une initiation profitable à l'enseignement régulier du prochain semestre. Nous entrions ainsi de plain-pied dans une activité intense et qui s'est maintenue pendant toute l'année, qui est même actuellement en constant devenir. La caractéristique de l'année 1946/47 est donc celle d'un effort de l'Université pour donner pleine satisfaction à ceux qui nous accordent leur confiance. Sa tradition, ses usages, ses méthodes, ses expériences ont toutes été pénétrées par la prise de conscience de tâches accrues qui l'ont conduite et continuent à la conduire à la recherche de solutions souvent urgentes, parfois hardies, pas toutes immédiatement réalisables, mais qui toutes sont génératrices d'une volonté de perfectionnement, de travail, de compréhension et de dévouement dont autorités, professeurs et étudiants sont à la fois les auteurs et les bénéficiaires.

Pour bien comprendre combien cet esprit tout ensemble de réflexion et d'application s'est imposé, il n'est que de se mettre en face des données statistiques qui nous sont révélées par les inscriptions du semestre d'hiver et du semestre d'été: Nous comptions au semestre d'été 1946, 1636 étudiants inscrits. Au semestre d'hiver 1946/47, nous sommes arrivés au chiffre jamais atteint de 2017. Au semestre d'été 1947, ce chiffre sera certainement dépassé.

Le nombre a déjà ses exigences. Mais la diversité d'origine, de préparation et d'orientation des étudiants l'a plus encore. Or, si la majorité des étudiants reste encore nationale (au semestre d'été 1946, 1169 étudiants suisses, dont 434 Genevois, soit le 60%, et 467 étrangers), le caractère international de l'Université de Genève ne s'en est pas moins accentué, puisqu'en hiver nous avons eu 811 étudiants étrangers représentant quarante-trois Etats différents, soit le 42% du nombre total.

Pour chaque catégorie de nos élèves, il nous faut étudier non seulement leurs titres à l'immatriculation, mais la direction passée et présente de leurs études, leurs désirs et leurs spécialisations.

Et les problèmes les plus importants se posent lorsque nous avons affaire à des contingents nombreux de ressortissants d'Etats qui marquent une prédilection plus affirmée pour notre pays.

Il en est ainsi depuis la guerre pour les étudiants des Etats-Unis, au nombre de cent cinquante-cinq pendant le semestre d'hiver, parmi eux les vétérans, soldats démobilisés, qui ont droit à des années d'études et pour lesquels leur gouvernement accorde de larges subsides, de même pour les deux groupes organisés de Smith College et de l'Université de Delaware, les jeunes filles de Smith College dirigées par Mmes Holden et Doty et les étudiants de Delaware, plus particulièrement voués à l'étude du français, sous la direction de M. le professeur Dougherty et de Mme Kleinschmidt.

Tant les autorités consulaires américaines que les maîtres dont je viens de vous donner les noms nous ont grandement facilité notre tâche, de même que M. le vice-consul Moore et M. Hayes, attaché aux vétérans en Suisse.

L'affluence d'autres étudiants étrangers est surtout grande dans les Facultés des Lettres, des Sciences économiques et sociales et de Médecine. Si c'est bien vers elles que se dirigent les vétérans américains, nous y trouvons aussi un fort contingent d'étudiants palestiniens (en tout pour l'Université, en hiver, 69). Les étudiants français (en tout 65) n'ont pas oublié la Faculté de Théologie, les étudiants yougoslaves nous restent (41 en hiver) et les étudiants italiens nous reviennent avec la paix (37 au même semestre). Parmi les autres nationalités représentées, je voudrais encore signaler des figures nouvelles, des Scandinaves, et en particulier celles des étudiants et professeurs syriens déjà pourvus de grades et qui se proposent de passer chez nous leur thèse, ce qui nécessite des concordances d'examens souvent peu faciles à déterminer.

Et le mouvement vers Genève n'est pas en train de diminuer, au contraire, puisque du Pérou, de l'Inde, de l'Iran, de la Tchécoslovaquie et de la Hongrie — sans oublier nos anciens élèves d'Egypte les demandes de renseignements et d'immatriculation continuent à arriver.

Pour achever ce tableau incomplet mais qui donne une idée de la diversité de notre recrutement, disons que la Faculté de

Médecine vient en tête pour le chiffre de ses étudiants (479 en hiver 1946/47) suivie de près par la Faculté des Sciences économiques et sociales (457), et que sur le nombre total des étudiants des Facultés, 572 — soit le 28,5 % — sont des étudiantes, dont 263 en Lettres — soit le 62,9% — (en hiver) ce qui constitue une majorité féminine, alors que la Faculté de Droit s'en tient, elle, au minimum de 10%.

Dans cette communauté où chacun doit trouver sa place, l'impulsion première appartient, selon le principe d'autonomie de la loi sur l'Instruction publique, à l'Université elle-même, soit aux Facultés, au Sénat et à son Bureau. L'augmentation du nombre des étudiants a donc représenté pour ces institutions un notable accroissement de travail, et ce travail repose surtout sur les épaules des doyens et du personnel administratif. Je ne saurais assez rendre hommage aux uns et aux autres. Non contents de siéger hebdomadairement au Bureau avec le Vice-recteur, M. le professeur Sauser-Hall et le secrétaire du Sénat, M. le professeur Wavre, et d'y apporter, comme eux, une attention soutenue à l'examen des affaires traitées, MM. les doyens Wenger, de Ziégler, Terrier, Battelli, Bickel et Courvoisier ont le soin de leurs Facultés, professeurs et étudiants, ce qui n'est pas actuellement peu de chose. Les membres du Bureau comme le président de la Commission administrative, M. le professeur Victor Martin, ceux des commissions, les administrateurs des instituts et chacun des professeurs dans leurs attributions particulières ont été, pour le recteur, des collaborateurs, des conseillers et des soutiens dont il est heureux de dire ici la bonne grâce, le dévouement et la compétence.

Mais que deviendraient les professeurs et leurs fonctions administratives si le personnel qui leur est attaché n'avait pas de sa tâche la haute idée dont ils fournissent quotidiennement la preuve. Que ce soit à la caisse, que ce soit au secrétariat, ailleurs encore dans les laboratoires et les salles de cours, en contact avec tous les usagers de notre maison, les uns comme les autres ont accepté joyeusement d'être mis à contribution au delà souvent de leurs forces.

Que ceux qui pourraient ne pas être encore persuadés de la pertinence de ma louange et de ma reconnaissance veuillent bien passer quelques heures — des heures de pointe comme l'on dit en langage technique — dans nos bureaux. Ils en remporteront

une impression définitive, celle de la parfaite obligeance et de la haute compétence du Secrétariat, que préside avec tant de sagesse M. Hermann Blanc, où s'affirment la précision, la conscience de M. François Lachenal et l'intelligence et la rapidité de nos secrétaires-dactylographes, Miles Han, Ronchi et Charlet, et également la patience et la maîtrise de notre caissier, M. Michaud, aidé de Mlle Copponex dans ses opérations complexes et difficiles, enfin les ressources inventives et précieuses de notre huissier, M. Berner, toujours sur la brèche avec l'appariteur, M. Lacroix, et ses camarades.

La vérité est que nos collaborateurs permanents ont été, cette année, plus encore que par le passé, soumis à une épreuve constante de rendement maximum et que, sous peine de les mettre en état d'épuisement dangereux ou d'arrêter l'expédition (les affaires les plus urgentes, il a fallu leur donner du renfort.

Alerté par nous, M. le conseiller d'Etat Picot a pris la peine d'apprécier les résultats d'expertises très poussées, et nous a autorisés à engager une secrétaire-dactylographe de plus, tandis que l'Office du personnel nous envoyait un commis en la personne de M. Victor Jaccard, licencié ès sciences sociales.

En attendant la mécanisation de notre système d'écritures, un matériel de bureau plus moderne et surtout des locaux plus spacieux, notre administration risquera moins de succomber à la besogne et surmontera les difficultés d'une tâche de plus en plus complexe.

Vouée tout entière à une action qui s'étend à tous ses membres, l'Université n'en a que plus douloureusement éprouvé une série de séparations qui sont pour elle autant de pertes sensibles.

Brusquement arrêté dans son enseignement, en décembre 1945, Alexandre Marlin-Achard a lutté pendant huit mois contre la maladie. Il nous a été enlevé le 23 juin 1946. Avocat et docteur en droit, homme politique et magistrat municipal, Alexandre Martin-Achard avait accepté en 1933 une charge de cours pour la propriété intellectuelle à la Faculté de Droit, reprenant ainsi l'ancienne chaire d'Edmond Pittard. Cette orientation nouvelle d'une carrière déjà fort remplie fut plus, pour lui, qu'une occupation accessoire. Sa réputation de

spécialiste et de praticien de cette branche du droit commercial était déjà consacrée. A la science qu'il ne cessa d'approfondir, il n'eut guère de peine à joindre la maîtrise d'un enseignement — devenu en 1940 celui d'un professeur extraordinaire — au service duquel il mit son talent, son ardeur et son sens de la vie. Il a profondément aimé l'Université et l'Université le lui a bien rendu, car là comme ailleurs — et peut-être plus qu'ailleurs — il se sentait entouré d'affections, d'estime et d'une sympathie générale que sa riche personnalité méritait entièrement et qui ne lui a jamais été refusée.

On ne sait ce qu'il faut le plus admirer dans la vie d'Albert Séchehaye, qui s'est achevée le 2 juillet 1946, de son humilité totale, de son désintéressement ou de sa science. A tous ces titres, il demeure POUF nous un grand exemple. Il a continué jusqu'aux derniers mois de son existence son enseignement de vieux français à la Faculté des Lettres, alors qu'il appartenait à l'Université depuis 1902, comme privat-docent et comme maître au Séminaire de français moderne.

Docteur en philosophie de Goettingue, puis élève à Genève de Ferdinand de Saussure, Albert Séchehaye fut, aux côtés de son ami Charles Bally, son aîné de quelques années, l'un des tenants de l'Ecole genevoise de linguistique qui se réclame de la pensée du maître et continue son oeuvre. Sa part dans cette création multiple n'est point minime, puisqu'elle peut invoquer des livres où l'originalité de la recherche rivalise avec la rigueur de la méthode, tels que Programme et méthodes de la linguistique théorique (1908) et Eléments de grammaire historique du français (1909), sans compter d'importants manuscrits dont la publication est hautement désirable.

Si la linguistique appelait à elle de bons ouvriers, elle ne pouvait leur offrir à tous des chaires magistrales. Albert Séchehaye ne s'en donna que plus consciencieusement à son enseignement de grammaire au Séminaire de français moderne; il suppléa Ferdinand de Saussure en 1912-1913 et Charles Bally en 1922 et 1931 et ne fut nommé qu'en 1929 professeur extraordinaire de la théorie de la grammaire. En 1936, ii reprenait, pour le vieux français, une part de l'enseignement d'Ernest Muret et en 1939 ii succédait à Charles Bally pour la linguistique générale. Cet homme aussi généreux que modeste, passionné pour les causes qu'il estimait justes et qu'il défendait dans son

journal L'Essor, s'est contenté de situations fort modestes dans les cadres du haut enseignement. Il n'en a que plus fermement affirmé sa fidélité au très haut idéal auquel il a conformé sa vie.

Emile André avait pris sa retraite avec le titre de professeur honoraire le 22 juillet 1932. Mais il avait conservé son laboratoire de zoologie lacustre et ses travaux se sont continués jusqu'au moment où la maladie a de plus en plus restreint son activité. Il est mort le 4 septembre 1946.

Ancien assistant d'Emile Yung, privat-docent en 1905, professeur extraordinaire en 1913, il recueillit, de la succession de son maître en 1918, une chaire ordinaire de protistologie, de parasitologie et zoologie lacustre. Expert de premier ordre pour tout ce qui touchait à la faune des eaux douces, Emile André n'a pas gardé pour lui et pour les seuls spécialistes les résultats de ses investigations, mais il a rendu de grands services aux pêcheurs et donné une saine impulsion à l'étude et à la protection des hôtes du lac de Genève et des rivières.

Hugo de Claparède, professeur extraordinaire de droit germanique en 1906, professeur ordinaire d'histoire du droit de 1922 à 1930, professeur honoraire dès cette année, a continué longtemps à donner des cours libres pour les étudiants allemands car, tout pénétré de science germanique, il avait pris une grande part, à la Faculté de Droit, à l'organisation des études destinées aux élèves d'outre-Rhin et s'occupait activement à rendre leur séjour à Genève agréable et profitable. Fort érudit son mémoire sur Les Burgondes jusqu'en 443 en est la preuve — très versé dans l'histoire des pays du Saint-Empire, il a constamment et avec énergie lutté par le travail contre une infirmité croissante. Il nous a été brusquement enlevé le 18 mars 1947.

Le Dr Raoul de Seigneux a conservé jusqu'à un âge avancé —il est mort à près de quatre-vingt-deux ans le 25 mars 1947 — une résistance et une force de volonté étonnantes. De 1907 à 1940 il fut, en qualité de professeur extraordinaire, puis de professeur ordinaire, dès 1911, chargé de la policlinique gynécologique et obstétricale. Praticien fort apprécié, préparé par de fortes études et de longs stages en Suisse et à l'étranger, le professeur de Seigneux a de pins en plus préféré l'enseignement à la clientèle et a formé à sa spécialité d'innombrables médecins. Ses recherches à la fois scientifiques et humanitaires l'ont dirigé

vers l'emploi de méthodes propres à éviter aux patients les inconvénients de l'apprentissage des débutants. C'est dans cette direction qu'il a obtenu des résultats que l'on a pu qualifier de révolution dans les méthodes de l'enseignement pratique de la médecine, la découverte et l'emploi d'une matière plastique et son utilisation pour la composition de pièces anatomiques employées par les étudiants pour leur expérimentation. Lorsqu'il passa à l'honorariat en 1940, la Faculté de Médecine tint à le conserver à la tête de l'Institut de plastique anatomo-chirurgicale qui lui doit sa création et aux produits duquel son nom restera attaché.

Atteint dans sa vue mais toujours fort alerte dans son activité créatrice, Charles Bally avait cru devoir abandonner en 1939 la chaire de linguistique générale et de comparaison (les langues indo-européennes qu'il occupait depuis 1913. Mais dans sa retraite laborieuse il nous demeurait présent, tant qu'il le put par le corps, et toujours par l'esprit. Malgré sa cécité progressive et grâce aux soins vigilants de son épouse et d'heureuses collaborations, il a pu mettre au point ses derniers ouvrages et continuer à recevoir — jusqu'à un mois avant sa mort, survenue le 10 avril 1947 — d'anciens élèves pour des séances, combien entraînantes, d'interprétations philologiques.

Elève et successeur de Ferdinand de Saussure, Charles Bally prolonge l'oeuvre de son illustre maître dans l'Ecole genevoise de linguistique et publie le Cours de linguistique générale. Mais lui-même est un créateur qui trace des voies nouvelles à la science du langage et y forme de nombreux disciples. Ce sont ses leçons au Séminaire de français moderne qui l'ont amené à formuler sa doctrine déjà en 1905 dans son Précis de stylistique puis en 1909 dans son Tarité de stylistique française. Toute sa sensibilité, toute son intelligence, il les donne à l'explication du langage, fait social, reflet de la vie psychique et affective et, dans une série d'ouvrages, décrit et élucide des phénomènes redoutables et jusqu'alors mystérieux: Le langage et la vie (1913), La crise du français (1930), Linguistique générale et linguistique française (1932). Ce dernier livre, remanié en 1944, nous donne comme la somme de sa pensée.

Ce qu'il convient de rappeler ici, c'est l'unité parfaite de cette vie, la concordance entre l'oeuvre du savant et celle du professeur. Charles Bally a su — chose rare — mener de front

ses recherches et ses leçons, enrichir les unes par les autres et faire pénétrer ses étudiants aux sources mêmes de son savoir. C'est en cela qu'il fut vraiment un maître.

La Faculté de Médecine a été éprouvée par la perte de deux de ses privat-docents enlevés dans la force de l'âge, le 20 septembre 1946 et le 10 avril 1947, le Dr Alexandre Epstein, habilité en médecine interne en 1936, et le Dr Jean Golay, privat-docent de dermatologie et de syphiligraphie dès 1921, longtemps assistant du professeur DuBois. Parmi les travaux de ces distingués cliniciens, il convient de signaler deux traités didactiques du Dr Golay, Dermatologie élémentaire (1941) et Vénérologie pratique (1941).

Aux proches de nos collègues disparus, nous joignons dans nos sympathies les familles frappées par la perte de ceux qui ont été arrachés en pleine jeunesse à leurs espoirs et à leurs affections, nos étudiants Nathan Shabès, Pierre-Georges Rouge et Werner Christ, tous trois de la Faculté des Sciences économiques et sociales, et Edmée Pick, de l'Ecole d'Architecture.

L'Université subit sans aucun doute de très sérieux appauvrissements par le départ de plusieurs professeurs atteints par la limite d'âge ou prématurément démissionnaires. Le rapport de mon prédécesseur, M. le recteur Antony Babel, a déjà signalé la retraite de M. le Dr René Koenig, professeur ordinaire de gynécologie et d'obstétrique. La Faculté de Médecine, réunie dans l'intimité sous la présidence de son doyen, le professeur Bickel, a apporté au nouveau professeur honoraire un bel hommage de reconnaissance et de respectueux attachement.

M. le Dr François Pfaeffli, professeur à l'Institut de médecine dentaire et président du collège de ses professeurs, a devancé l'époque de la cessation légale de ses fonctions et envoyé sa démission au Département de l'Instruction publique le 14 septembre 1946. Mais il a consenti à se suppléer lui-même jusqu'au moment où son successeur pourrait reprendre son enseignement de couronnes et appareils à ponts, soit jusqu'à la fin du semestre d'hiver. M. Pfaeffli reste pourtant des nôtres, non pas seulement comme professeur honoraire, mais par l'activité qu'il déploie dans de multiples domaines en faveur de l'Université. Si nous sommes aux regrets de le voir quitter la chaire qu'il a occupée, avec combien de dévouement et de succès, pendant vingt-neuf années, nous avons cependant la consolation de la conserver à

la Commission administrative, à la Société académique, à la commission de l'Institut de physique, heureux que nous nous estimons de recevoir toujours son appui fidèle et ses conseils. Car il s'est acquis de nombreux titres à notre reconnaissance dont le moindre n'est pas la construction de l'actuel Institut de médecine dentaire.

M. le Dr Franz Leuthardt, appelé en 1942 à Genève en qualité de professeur extraordinaire de chimie physiologique, nous quitte pour répondre à une vocation flatteuse de l'Université de Zurich. Son passage à l'Ecole de Médecine n'en a pas moins donné une impulsion remarquable à sa discipline et au laboratoire qu'il a dirigé selon des méthodes qui ne seront pas oubliées.

La loi du 14 février 1931 fixe la retraite des professeurs de l'Université à soixante-dix ans, alors que ceux qui ont été nommés antérieurement à cette date peuvent être maintenus jusqu'à septante-cinq ans. Son application est très sensible cette année, particulièrement pour la Faculté de Médecine, où elle atteint trois professeurs, MM. Pierre Besse, Zareh Chéridjian et Jean-Alfred Veyrassat.

M. le professeur Besse dirige depuis 1921 l'Institut de physiothérapie à l'Hôpital cantonal. Il a été nommé en 1934 professeur ordinaire de diététique, de physiothérapie, d'hydrologie et de climatologie médicales. Nous ne pouvons que rappeler ici, par ces titres, l'étendue de ses connaissances, à laquelle le dévouement à ses malades et à l'Université ne le cède en rien.

M. Chéridjian, professeur extraordinaire en 1923, puis en 1931 ordinaire, de policlinique d'oto-rhino-laryngologie, est à la tête d'un service hospitalier qui lui a permis d'initier des générations d'étudiants à la spécialité qu'il pratique, d'enseigner et de traiter ses malades avec autant de sciences que de talent et de coeur.

M. Jean-Alfred Veyrassat achèvera en juillet sa trente-septième année d'enseignement comme professeur ordinaire de policlinique chirurgicale, à laquelle il a joint en 1917 la chirurgie générale et la médecine opératoire. Licencié ès lettres avant d'être docteur en médecine, il a siégé au Bureau du Sénat en qualité de secrétaire de 1928 à 1930. La longue suite de ses services permet de se rendre compte de la grande place qu'il tient dans notre maison et dans notre Faculté.

Il y a cinq jours, le Conseil d'Etat acceptait la démission de M. le professeur Jean-Amédée Weber. Jusqu'au dernier moment nous avions espéré que M. le professeur Weber, qui n'est point atteint par la limite d'âge, accepterait de continuer l'enseignement de l'anatomie normale dont il a été chargé en 1917 et de conserver la direction de son institut. Evidemment, après de si longs et de si éclatants services, M. Weber a le droit de penser que l'heure — non pas de la retraite — mais d'occupations plus libres, est venue pour lui. Son départ n'en sera pas moins une grande perte pour l'Ecole de Médecine, la Faculté et l'Université où il possède la reconnaissante et profonde estime de ses collègues et la respectueuse affection de ses élèves.

MM. Pfaeffli, Besse, Cheridjian, Veyrassat et Weber ont été nommés professeurs honoraires de l'Université.

Nous éprouvons de vifs regrets à nous trouver ainsi en face du prochain achèvement de carrières si utilement et si dignement remplies et nous disons à nos collègues que nous ne voulons pas dénouer les liens qui nous attachent à eux et que notre reconnaissance leur est intégralement acquise.

La loi sur la retraite des fonctionnaires cantonaux va de même nous priver des services d'un chargé de cours dont la collaboration nous était précieuse, le Dr Pierre-Henri Balavoine, chimiste cantonal, chargé de cours pour l'analyse des denrées alimentaires dès 1942.

Comment, en présence des changements consécutifs à ces départs, de l'obligation de maintenir la qualité de ces enseignements et d'assurer leur développement dans la mesure où tout arrêt serait un recul, de la nécessité de répondre à l'attente d'une variété si nombreuse d'étudiants, de sa volonté d'être à Genève un foyer de culture largement accessible, l'Université a-t-elle organisé sa vie et compris sa tâche? C'est ce que nous voudrions faire apparaître dans les quelques instants qui nous restent, en insistant sur les plus saillantes de nos préoccupations et de nos réalisations.

L'Université propose et l'Etat dispose, mais l'Université a le devoir de méditer ses intentions et de suivre une direction

raisonnée qui porte en elle-même sa justification. C'est à quoi les Facultés, le Sénat et son Bureau se sont appliqués, dans la conscience de leurs responsabilités et de leurs privilèges. Et quant à l'Etat, ses mandataires et ses représentants ne nous ont jamais refusé leur sympathie et leur confiance. Leur désir de satisfaire nos demandes ne trouve ses limites que dans les exigences d'une économie prudente. Nous devons donc rendre hommage à la sollicitude du chef du Département de l'Instruction publique, M. le conseiller d'Etat Albert Picot, dont nous mettons continuellement à contribution le temps, le travail, l'obligeance, la compétence et parfois même la patience et qui nous écoute avec autant de bonne grâce que de conscience. Ses services nous donnent constamment leur assistance, et notamment ses deux secrétaires, MM. Henri Grandjean et Auguste Merlo, ces fonctionnaires modèles, si modèles même que dans leurs coeurs se livre une lutte sévère entre la faveur dont nous jouissons auprès d'eux et la défense attentive des intérêts de l'Etat.

Nous n'oublions pas aussi tout ce que nous devons au Grand Conseil et à sa commission du budget, aux Départements des Travaux publics et des Finances dont les chefs, MM. les conseillers d'Etat Perréard et Casaï, savent au moment propice agréer nos propositions, à la Ville de Genève enfin, gardienne de nos collections et gérante d'une grande part de nos ressources intellectuelles.

M. le conseiller administratif Baud-Bovy n'a jamais séparé les intérêts qui lui étaient confiés de ceux de l'Université et son passage trop court à l'Hôtel municipal laissera des traces durables. Nous témoignons à son successeur, M. le conseiller administratif Marius Noul, une semblable et respectueuse confiance.

Jugez vous-même, Mesdames et Messieurs, des résultats obtenus grâce au concours de tant de bonnes volontés qui se sont exercées pour notre bien dans le présent et qui agiront de même dans l'avenir.

M. le recteur Babel rappelait l'an passé la nécessité de rééquiper, après cinq ans de guerre mondiale et l'épuisement de leurs stocks, nos laboratoires, et de reprendre l'accroissement normal de nos bibliothèques. Etant donné l'augmentation des prix, cela ne pouvait que se traduire par une note assez

copieuse. Or, tant le Département de 1' Instruction publique que le Conseil d'Etat, le Grand Conseil et ses commissions, ont fait bon accueil aux mémoires de nos Facultés. Ils ont voté un crédit annuel de cent mille francs renouvelable pour trois ans qui entraînera une réadaptation de nos instruments de travail.

Après un temps de restrictions, nous pouvions donc concevoir de grands espoirs et nous ne nous sommes pas fait faute de présenter à M. le conseiller d'Etat Picot des projets de création et d'amélioration de nos moyens dont vous allez reconnaître les heureux effets.

Il est vrai que notre propre liberté (le mouvement est étroite et que nous nous trouvons, plus souvent que nous le voudrions, forcés d'entretenir les Départements de l'Instruction publique, des Finances et des Travaux publics de sujets très divers, de publicité, d'entretien, de nettoyages, de renfort de personnel, etc. La situation de nos employés nous tient à coeur et nous avons l'impression que les règles immuables des échelles de traitement et des déclassements de fonctionnaires risquent parfois de nous priver de services difficiles è remplacer.

Tel est le cas de Mme Marguerite Weigle qui, appelée à des fonctions importantes à la Bibliothèque du Musée d'Art et d'Histoire, nous quitte après dix-huit ans d'excellents services à la Bibliothèque de la Faculté de Droit.

Si nous prêtons une grande attention aux programmes de travail prévus pour les membres de notre corps enseignant, nous ne tenons pas particulièrement à délibérer sur la partie des arrêtés de nomination qui concernent les traitements, estimant qu'une fois des principes généraux admis ces questions peuvent être utilement débattues entre les intéressés et le Département. Cependant, le Bureau du Sénat n'a pas pu se désintéresser de la détermination de ces principes, et plus particulièrement de la situation des professeurs chargés de la direction de laboratoires et qui, du fait de l'augmentation massive du nombre des étudiants et de la multiplication dès séances de travaux pratiques, ont vu leurs prestations personnelles s'accroître sans contrepartie matérielle. Il a donc communiqué à ce sujet au Département diverses suggestions et étudié les documents que celui-ci a produits, et l'examen approfondi de ce problème délicat se continue.

Pour toutes ces raisons et pour d'autres encore, il apparaît plus que jamais opportun d'augmenter les ressources dont l'Université peut avoir la disposition par le Fonds général constitué en 1945. C'est à quoi s'est employé un grand comité formé de représentants autorisés de tous ceux qui sont acquis à notre cause et qui, cet hiver, a lancé dans la population genevoise une souscription publique en faveur du dit Fonds général. Je ne puis rendre compte à cette place, comme il le faudrait, de toutes les péripéties et des résultats de cette action qui n'est du reste pas close. Le point de départ a été la séance d'information de la Salle de la Réformation, où un public nombreux et amical a entendu les exposés de M. Albert Picot, conseiller d'Etat, de M. Adrien Lachenal, conseiller national, et de M. Jean Stocker, président de l'Association générale des étudiants, encadrés par les prestigieuses exécutions musicales de M. André Perret et du quatuor Loewenguth et par la présentation d'un film obligeamment prêté par la Légation britannique.

Dès lors, le mouvement a été soutenu avec ténacité par la propagande active des membres du comité et du corps enseignant qui, comme le professeur Jean-Amédée Weber, ont convié le public à s'initier à leurs travaux, de la presse, de la radio et de nombreux de nos amis qui se sont acquittés de démarches efficaces. Tous ont vraiment mis une obligeance incomparable à user de leur influence en notre faveur et les résultats financiers sont là qui attestent tant leur dévouement que la compréhension de ceux qu'ils ont sollicités. A ce jour, le Fonds général s'est accru de près de cent mille francs et la souscription reste ouverte. Je dois dire que, malgré ce qui peut sembler intéressé dans notre attitude, nous remportons de cette opération financière une impression réconfortante. Des témoignages touchants de confiance et d'attachement nous sont parvenus de modestes donateurs qui se sont imposés dans une forte proportion pour notre maison, de même que de plus gros souscripteurs capables de plus importants efforts. Les listes publiées par les journaux vous ont renseignés à ce sujet. Nous avons retrouvé, semble-t-il, quelque chose de l'esprit de la fondation de l'Académie, de l'émulation de 1559 qui mettait en ligne l'ambassadeur de France auprès des Ligues, le syndic de l'arche et Jenon Pons, boulangère.

Je dis que la souscription n'est pas close et j'en donne immédiatement la preuve, car tout récemment une donation fort

importante de Mme Edouard Claparède est venue s'ajouter à ses libéralités précédentes et à celles de son mari, notre regretté collègue. C'est en mémoire de lui que Mme Claparède a fait cession S l'Université à des conditions tout à fait avantageuses d'une propriété sise au chemin Sautter et dont la réalisation prochaine sera pour notre Fonds un apport précieux.

Le Fonds général ne peut donner immédiatement un fort rendement. C'est une entreprise de longue haleine et qui portera plus tard tous ses fruits. Mais pour le présent, peut-on espérer un accroissement des ressources budgétaires destinées à l'Université? L'intervention de M. Adrien Lachenal au Conseil national, les voeux de la Conférence des Recteurs pour une participation de la Confédération à l'entretien des Universités cantonales aboutiront-ils à un soutien plus rapide? Il s'agit là d'un problème de politique financière qui ne nous appartient plus et dont la Conférence des Directeurs de l'Instruction publique et les gouvernements de nos cantons sont saisis.

En attendant, nous n'avons garde d'oublier qu'il existe en Suisse et à Genève des institutions auxquelles il peut être fait appel pour les recherches et les publications scientifiques, la Fondation pour les recherches propres au développement de l'économie nationale, les fonds destinés à créer des occasions de travail, la communauté de travail Pro Helvetia, d'autres encore qui ont déjà et peuvent être encore utilisées par les professeurs et les étudiants.

Et puis le Fonds général ne nous a pas privés de générosités à buts précis et tout aussi bienvenus. MM. les professeurs Edouard Folliet et Paul Logoz ont enrichi leurs fondations précédentes, le premier par une contribution de 5000 fr. au capital du prix qui porte son nom, le second par une augmentation notable de la Bourse Alfred Gantier.

Mme Georges Regard de Rougemont, elle aussi créatrice d'un prix en souvenir de son regretté mari, a fait don à l'Institut d'Hygiène de son microscope qui fut celui du professeur Adolphe d'Espine.

Aux remerciements qui s'adressent à ces bienfaiteurs, nous joignons ceux qui vont aux personnes et aux groupements qui pensent que l'Université mérite d'être ornée, embellie et enrichie de souvenirs et d'oeuvres d'art. Le 5 juillet 1946, le comité que présidait M. le professeur Marcel Raymond a fait placer au rez-de-chaussée de cette maison, au cours d'une cérémonie empreinte de vénération et de reconnaissance, le buste de Bernard Bouvier, nouvelle et belle oeuvre du sculpteur Karl Angst.

Un portrait de Carl Vogt, soi-disant par lui-même, mais signé du nom de Rehl, don du petit-fils du grand naturaliste, a pris place dans la salle du Sénat, et les étudiants hollandais de l'année 1945/46, en témoignage de leur reconnaissance, nous ont fait tenir une gravure qui orne notre salle d'attente.

Verrons-nous un jour les rectangles bétonnés qui se trouvent sous les vitraux de Cingria, derrière mon dos, recevoir une décoration appropriée. On en peut discuter, et le projet à la fois héraldique et épigraphique retenu par le Bureau du Sénat n'a pas été agréé par les Départements des Travaux publics et de l'Instruction publique: De gustibus et coloribus non disputandum est.

Au moins la Faculté de Médecine a-t-elle pu inaugurer la statue offerte par le Dr Plontz et qui orne désormais le hall d'entrée de son Ecole.

L'Université se trouve cependant devant un problème plus compliqué que celui de la décoration de son aula, celui de l'exécution du programme de constructions propres à assurer son existence normale et son extension. Vous connaissez les données essentielles de ce problème d'urbanisme au sujet duquel l'accord s'est fait, sous réserve de modification imposées par les circonstances, à partir du moment où M. le recteur Bujard en a proposé nue solution d'ensemble bientôt adoptée par les pouvoirs publics.

Actuellement, nous sommes à la veille des premières réalisations puisque le Conseil d'Etat a fait figurer dans la prochaine série des grands travaux, pour lesquels des crédits importants seront demandés au Grand Conseil, la construction de l'Institut de Physique dans les terrains situés entre l'Arve et le boulevard Carl-Vogt et la première étape de la reconstruction de l'Hôpital cantonal, la construction des policliniques. Pour l'Institut de physique, le projet de M. l'architecte Honegger est prêt et les

crédits d'équipement intérieur ont été fournis par un apport généreux des industriels genevois, sous les auspices de la Société Académique. Quant aux policliniques, les études sont le fait de commissions et d'experts qui relèvent de l'entreprise hospitalière dans son ensemble. Il est cependant bien entendu que l'Université prend un grand intérêt à la mise rapide en chantier d'une oeuvre qui concerne aussi bien les soins médicaux de la population que l'enseignement de la Faculté de Médecine.

Il n'a pas cependant été possible d'attendre le départ de ce premier train de crédits et de travaux pour opérer dans nos bâtiments actuels les aménagements rendus urgents par l'affluence des étudiants. Durant l'été, les demandes de plus en plus nombreuses d'immatriculation nous ont fait prévoir un peuplement inusité de nos auditoires et de nos laboratoires, surtout aux Facultés de Médecine et des Sciences. Arrêter notre recrutement, fermer nos portes à la jeunesse de tous les pays qui ont besoin des hautes écoles aurait été une abdication, un refus de persévérer dans la mission à la fois scientifique, sociale et humanitaire de notre pays. Accepter des étudiants et les laisser au seuil de nos salles de cours, c'était d'autre part abuser de leur confiance. Il a fallu donc aller au plis urgent, alerter les départements compétents et, grâce à la décision de M. le conseiller d'Etat Casaï et à l'habileté de l'architecte, M. Falciola, agrandir l'auditoire de l'Ecole de médecine au moyen d'une galerie de bois qui est un chef-d'oeuvre d'équilibre.

Cet expédient sera prochainement remplacé par l'édification d'un nouveau corps de bâtiment à l'Ecole de Médecine (lui recevra une salle de cours plus spacieuse et divers services fort utiles. Là aussi le projet est prêt et il ne reste plus qu'à passer à l'exécution, cet. été, avec les crédits que l'Etat voudra bien attribuer à une réfaction qui fait partie de son programme général.

Pour les laboratoires de la Faculté des Sciences, force a été de trouver de la place en serrant les rangs, c'est-à-dire en répartissant les espaces utilisés selon une compression pas toujours très favorable au travail. Aussi de nouveaux aménagements sont-ils en cours à l'Ecole de Chimie, alors qu'à l'Université même peut-être trouvera-t-on le moyen de créer un nouveau bureau pour notre administration mais guère de plus amples agrandissements, à moins de remaniements considérables.

L'Université sera donc condamnée à une stagnation dangereuse et à un arrêt dans le développement que réclame l'attraction qu'elle exerce, tant que le projet sur lequel l'accord est unanime ne pourra pas être réalisé, soit l'acquisition par l'Etat du Museum et son aménagement conforme aux projets déjà conçus, étudiés et adoptés dans leurs grandes lignes. Le concours pour la construction du Museum à Malagnou vient de se terminer par le dépôt de quarante-trois projets. Le jury s'est prononcé et il appartient maintenant au Conseil administratif de continuer les préparatifs d'une réalisation qui dotera la Ville de Genève, par conséquent la population genevoise, d'un musée d'histoire naturelle digne de ses collections et de leur utilisation, et ensuite l'Université d'un logement approprié dans la promenade des Bastions. Ainsi nous approcherons du double but vers lequel vont nos voeux les plus ardents.

Cela ne nous empêche pas, dans l'expectative où nous sommes — au contraire cela nous encourage — à adapter les institutions de notre haute école aux besoins nouveaux. Il s'agit surtout de l'organisation des études qui souvent débordent le cadre des Facultés ou bien demandent entre ces dernières une collaboration étroite.

On a pu en juger par les cours ou conférences générales, auxquelles nous convions avec les étudiants le public de notre ville, voulant par ce moyen lutter contre une spécialisation trop compartimentée et mettre en valeur l'unité fondamentale de la connaissance. Ces cours généraux ont constamment réuni des publics attentifs et nous remercions les professeurs qui consentent à figurer sur le programme et à faire connaître leurs recherches et leurs préoccupations. Dans cet ordre d'idées et en plus du cours régulier de M. le professeur Henri Reverdin, L'introduction à la pensée scientifique, nous faisons une large place aux savants étrangers qui nous honorent d'une visite et d'une collaboration. Vous êtes venus nombreux applaudir ces maîtres et vous avez reconnu la haute tenue d'exposés qui élargissent nos horizons et renouvellent bien de nos conceptions. La liste de ces leçons est trop longue pour que je la reproduise ici et je me contenterai de citer quelques noms, qui vous remettront en

mémoire de belles heures passées dans cette aula, tels que ceux de MM. Stephen Spender, Eugenio Mentale, Etienne Gilson, Albert Dauzat, Gabriel Marcel, en sciences MM. Armand Denjoy, René Fabre, Gara Theodory, Egewary, en médecine Edwin Cohn, Ling, Corneille Heymans, Lipschütz, Berthet, et, tout récemment, les quatre leçons données sous les auspices de la fondation Mlle Marie Gretler par M. le professeur Camille Le Senne sur L'expérience de la Valeur.

Cette extension universitaire en dehors des cours réguliers mérite peut-être un statut particulier. Mais dès maintenant des instituts ou des centres d'études, même une école se rattachent à l'Université dans son ensemble et non à une Faculté. C'est le cas de l'Institut de Biologie et de Chimie médicales, de l'Institut d'Education physique et de sport, précédemment constitués, puis de l'Institut d'Etudes slaves, véritable centre de conférences et de cours, que dirige avec le plus grand zèle M. le professeur Liebeskind. L'Institut des Sciences pédagogiques, de vieille réputation, se rangera peut-être bientôt sous un semblable régime. Et surtout l'Ecole d'architecture nous appartient en propre, sous la direction d'une commission où siègent des professeurs de l'Université et des architectes.

Nous souhaitons une cordiale bienvenue aux membres de son corps enseignant, professeurs, professeurs attachés et chargés de cours, nommés par des arrêtés du 9 avril 1947 et, à leur tête, M. Paul Rossier, administrateur de l'Ecole, et M. Eugène Beaudoin, directeur des études. Tout récemment l'exposition au Musée Rath des travaux d'élèves de l'Ecole d'architecture a fait connaître au public genevois les méthodes de son enseignement et les beaux résultats déjà obtenus. Ce fut là une révélation dont nous acceptons l'augure avec confiance.

A m'entendre, il n'est pas impossible que vous conceviez quelques craintes quant à la dispersion de nos efforts et à la multiplication d'enseignements disparates et coûteux. Vous pouvez vous rassurer, car nous ne cédons pas à un désir exagéré d'innovation, mais nous tenons compte d'expériences positives qui légitiment non pas le renversement de notions qui ont fait leurs preuves, mais leur concordance avec le mouvement même de la science et de ses applications didactiques.

D'ailleurs, si l'Université est vraiment, par sa vocation, un centre productif, le foyer d'un rayonnement intellectuel, son action ne peut que se prolonger dans de multiples directions qui dépasseront ses cadres traditionnels et qui, même si elles sortent de son appartenance directe, n'en remonteront pas moins à la source de son influence.

L'avenir nous dira dans quelles directions cette influence peut encore s'exercer. Sera-ce par exemple le développement de la médecine préventive que des projets actuellement entrevus situeront dans le cadre de l'Institut d'Hygiène, avec des dépendances qui serviront d'exemple à la pratique de nouvelles méthodes étendues et généralisées? N'est-ce pas déjà par la collaboration personnelle des professeurs et privat-docents, à des institutions dues à l'initiative privée comme les cours de l'Université ouvrière et ceux des Cours réunis?

De toutes façons, les sollicitations dont nous sommes l'objet, les projets qui nous sont communiqués, les enquêtes qui nous sont adressées montre le rôle de plus en pius vaste que les hautes écoles se voient assigné. C'est aussi l'impression que nous ressentons au cours des entretiens qu'il nous est donné d'avoir avec nos hôtes de l'étranger, que ce soient les professeurs que nous accueillons dans nos chaires ou les visiteurs qui reprennent avec nous d'anciennes relations ou en nouent de nouvelles, tels les recteurs des universités de Coïmbre ou d'Heidelberg, les chefs de missions scolaires, les attachés culturels des légations, un représentant du futur gouvernement des Indes, des délégués à Genève des conférences de l'O.N.U., des médecins portugais en voyage en Suisse, les étudiants invités par l'Association générale, M. Etienne Gilson, de l'Académie française, M. Henri Leenhardt, doyen de la Faculté de théologie de Montpellier, M. R. Doucet, recteur de l'Académie de Besançon. Il en est de même au cours des réunions et des cérémonies auxquelles l'Université est conviée, ce qui l'honore et l'instruit, bien que cette représentation soit parfois une lourde charge pour ceux qui en reçoivent le mandat. A Genève, nous manifestons par notre présence combien nous sommes sensibles à de semblables attentions. En Suisse, nous gardons un contact étroit avec les Universités nos soeurs par la Conférence des Recteurs, par bien d'autres invitations que nous recevons d'elles, comme le Dies Academicus de Bâle et l'inauguration des cours de Lausanne.

Je n'aurais garde d'oublier l'abbaye du Zimmerleuten à Zurich qui a tenu à nous associer, en la personne du professeur Paréjas, à sa fête du Sechseleuten et, sur un plan plus universel, l'inauguration du centre oecuménique à Bossey près Céligny, le bicentenaire de l'Université de Princeton, le cinq-centième anniversaire de l'Université de Bordeaux, bien d'autres occasions qui nous ont été données encore de nous rendre compte de la fermentation des idées et de l'acuité des problèmes qui, dans le monde entier, touchent à l'instruction supérieure et à la vie des universités.

Un mouvement semblable anime nos Facultés. La Faculté des Sciences, comme la Faculté de Médecine, a dû prendre les dispositions les plus rigoureuses pour accueillir dans ses laboratoires le nombre actuel de ses étudiants. Elle a pu renforcer quelques-uns de ses enseignements les plus chargés. M. Rodolphe Cortesi, chef des travaux de botanique, inaugurera cet automne un nouveau cours de phytotechnologie, en qualité de professeur extraordinaire. Mlle Kitty Ponse, chargée de cours et directrice adjointe de la Station de Zoologie expérimentale, a reçu la juste récompense de ses travaux par sa nomination de professeur extraordinaire d'endocrinologie. Elle est la première femme qui occupera une chaire à la Faculté des Sciences. En chimie, M. Bernard Susz, assistant bénévole au laboratoire de chimie physique, a été pourvu d'une charge de cours.

M. le professeur Jean Weigle, appelé à l'Université de Cleveland, a pris un congé d'une année, congé laborieux qui ne sera pas perdu pour l'Université. M. Weigle va nous revenir docteur honoris causa de l'Université de Cleveland. A Genève, il a été remplacé par M. Richard Extermann, privat-docent. De même, M. Augustin Lombard, chargé de cours, séjourne aux Etats-Unis et ses fonctions ont été reprises par M. Georges Rosier.

Nous avons vivement regretté l'absence prolongée, pour cause de maladie, de M. le professeur Guyénot et nous sommes heureux de son rétablissement. Son chef de travaux, M. Eugène Binder, l'a temporairement remplacé.

De nouveaux privat-docents ont été reçus à la venia legendi, savoir: M. Peter Bernfeld et M. Denys Monnier pour la chimie, M. Richard Extermann pour la physique, M. Jean Ruffet pour les mathématiques, 1VI. Georges Rosier pour la géologie et M. Marc Vuagnat pour la pétrographie chimique.

En plus des initiatives qu'elle a prises et des activités auxquelles elle participe, il faut mettre à l'actif de la Faculté des Sciences le rôle éminent qu'elle joue au sein de la Société suisse des Sciences naturelles, devenue récemment académie. Cette année, le comité central, présidé par M. le professeur Tiercy et formé de Genevois, a terminé ses six ans de fonctions, et la prochaine assemblée générale aura lieu à Genève du 30 août au 1er septembre prochains. Le comité local, présidé par M. le professeur Wenger, a une lourde tâche à accomplir pour que cette réunion réussisse ei soit digne des précédentes, dont la première, en 1815, et celle du centenaire, en 1915. L'Université le soutiendra de tout son effort.

Grâce à M. le professeur Wavre, les mathématiciens étrangers continuent à venir à Genève et à se faire entendre dans des conférences et des séances de discussion. C'est là, sous une forme plus modeste, une sorte de reprise heureuse des Colloques de mathématiques de l'avant-guerre.

A la Faculté des Lettres, c'est aussi l'affluence, surtout à l'Ecole d'Interprètes, au Séminaire de français moderne, à l'Ecole pratique de langue française. MM. les administrateurs Alexis François et Antoine Velleman se sont trouvés devant des obligations accrues et nos services ont fait ce qu'ils ont pu polir alléger une besogne administrative compliquée.

Les étudiants étrangers n'ont parfois pas une connaissance de la langue française qui leur permette de suivre avec profit les cours dès leur arrivée. Aussi a-t-il fallu adapter les programmes de l'Ecole pratique pour faciliter leurs débuts. Au Séminaire de français moderne également, l'enseignement multiplié fait appel à nos anciens et fidèles collaborateurs secondés, comme aux cours de vacances, par des forces nouvelles et plus jeunes.

Nous avons eu de fréquents entretiens avec les directeurs des deux groupes d'étudiants des Etats-Unis qui ont choisi, nombreux et zélés, l'Université de Genève pour leur séjour d'une

année sur le continent, et nous avons cherché avec eux à faire correspondre nos enseignements aux besoins et aux exigences des Universités américaines. Cette collaboration avec Mmes Holden et Doty pour Smith College et avec M. Dougherty et Mme Kleinschmidt pour l'Université de Delaware a été fort agréable et flOS relations avec les maîtres et les élèves de ces institutions tout à fait cordiales. Nous espérons que pour eux aussi elles ont abouti et aboutiront encore à des résultats satisfaisants.

A la Faculté des Lettres, les enseignements ont aussi été complétés et renforcés; M. Serge Karcevski, jusqu'ici chargé de cours, a été nommés le 5 juillet 1946 professeur extraordinaire de langue et littérature russes. M. Paul Collart, qui dirige avec tant de succès les cours de vacances, donnera désormais en qualité de chargé de cours un enseignement d'épigraphie grecque et romaine qui sera un utile complément à l'histoire de l'antiquité. Et puis de nouveaux privat-docents sont venus augmenter le corps professoral, Mme Anne-Marie Ferrero-Speckel pour la littérature italienne, M. Pierre Bouffard pour l'archéologie, M. Fernand-L. Mueller pour la philosophie, M. Pedro Rossello pour la pédagogie et M. Yuan Yuan pour l'histoire de la philosophie chinoise. Enfin, rare distinction, M. le professeur Waldemar Deonna a été nommé membre correspondant de l'Institut de France, Académie des Inscriptions et Belles Lettres.

A la Faculté des Sciences économiques et sociales, l'aide d'assistants a tout de suite montré son utilité et trouvé son emploi, comme du reste dans les Facultés des Lettres et de Droit. M. Pierre Folliet, assistant de M. le professeur Terrier, n'a pas eu besoin d'autres titres que sa remarquable thèse de doctorat pour recevoir le droit d'enseigner comme privat-docent.

Les étudiants de la Faculté, très nombreux aussi, ont eu bien des occasions d'entendre traiter des grands problèmes qui tiennent à l'application de leurs disciplines, en particulier les conférences de M. le professeur Georges Lasserre, de l'Université de Lyon, dans le cycle des études coopératives.

M. le professeur William-E. Rappard, messager ultra rapide de notre Université, a franchi une fois de plus les mers pour se faire entendre aux Etats-Unis et pour rapporter de l'année bicentenaire de l'Université de Princeton un doctorat honoris

causa. Il ne s'en est plongé qu'avec pius d'ardeur dans ses recherche d'histoire contemporaine de la Suisse.

Pour encourager les théologiens à approfondir leurs connaissances de la réalité humaine, la Faculté a créé à leur intention un certificat d'études sociales.

Signalons enfin que M. Franz Carl de Clavé a été autorisé à annoncer un cours en qualité de privat-docent.

La Faculté de Droit elle aussi a réalisé un projet dès longtemps caressé d'extension de ses enseignements et de révision de son programme de licence. Eile a tout d'abord quelque peu réduit le cours de propriété intellectuelle qu'elle a confié à M. Edmond Martin-Achard, docteur en droit. Puis elle a inauguré un enseignement de philosophie et de théorie du droit dont M. Claude DuPasquier, professeur à l'Université de Neuchâtel, a été le titulaire en qualité de chargé de cours puis, pour le semestre prochain, de professeur ordinaire. M. DuPasquier reprendra également les assurances privées et sociales dont MM. les professeurs Graven et Carry, par ailleurs trop chargés, ont été libérés.

M. Alexandre Berenstein, docteur en droit, qui vient d'être nommé chargé de cours, inaugurera l'hiver prochain un enseignement de législation du travail. MM. Bernard Gagnebin, Jean-T. Lacour, Adrien Robinet de Clery et Adolf-F. Schnitzer ont été inscrits au nombre des privat-docents de la Faculté.

La Faculté de Médecine n'a pas lieu de se réjouir du départ d'un grand nombre de ses professeurs atteints par la limite d'âge ou démissionnaires avant terme. Elle n'en a pas moins proposé et obtenu toutes sortes de créations et d'adaptations qui montrent bien l'entrain et le courage qui l'animent.

Elle a devancé le début du semestre pour accueillir les participants à sa semaine de médecine sociale, à laquelle elle a associé des juristes et des sociologues et qu'a dirigée M. le professeur de Morsier. Puis elle a prouvé qu'elle avait de la mémoire et aussi de la reconnaissance en célébrant le soixante-dixième anniversaire de sa fondation, anniversaire qui est aussi celui de la transformation de l'Académie en Université. Au cours d'une séance solennelle, M. le doyen Bickel a fait l'historique des premières chaires de la Faculté et décrit la carrière de ses titulaires. Puis il a annoncé une promotion imposante de docteurs honoris

causa qui se compose de MM. les Drs Edwin Cohn, H. W. Florey, B. A. Houssay, René Leriche, Arthur Stoll et Karl Wegelin. Le soir, au cours d'un dîner présidé par le Doyen, les savants que l'Université venait d'honorer et qui étaient présents à Genève ont exprimé de façon charmante leurs sentiments. Et le 17 mars M. le Dr Edwin Cohn, membre de la même promotion, après une conférence à la Faculté, a lui aussi pris possession de son nouveau titre.

La Faculté de Médecine et son doyen savent évidemment bien faire les choses. Ils l'ont encore prouvé par la réunion intime en l'honneur de M. le professeur René Koenig. Quant à M. le professeur François Pfaeffli, c'est à l'Institut de Médecine dentaire, sa création, qu'il a reçu le 7 mai les témoignages d'affectueuse gratitude de ses collègues, confrères et élèves. L'Université n'a pas été absente en cette journée qui fêtait l'un de ses plus dévoués serviteurs. Elle a fait tenir à M. Pfaeffli la médaille qu'elle considère comme une distinction rare et significative.

Mais la Faculté de Médecine est aussi à l'oeuvre dans ses auditoires, ses laboratoires et ses cliniques. Elle entend répondre à l'attente de ses nombreux étudiants, un peu pressés autour de leurs maîtres mais d'autant plus attentifs et pleins d'ardeur. Aussi la liste des conférences qu'elle a fait entendre hors programme est-elle longue comme celle des missions et des communication de ses propres professeurs. Il faut les réserver pour le rapport administratif.

En revanche, le tableau des créations et des nominations intervenues dans la Faculté vous donnera une idée des méthodes suivies pour assurer la continuité des enseignements capitaux et la spécialisation inévitable (le la médecine. M. le professeur Bickel ayant désiré renoncer à son enseignement de policlinique médicale, pour conserver des charges tout aussi lourdes, M. le Dr Eric Martin a été appelé à lui succéder en qualité de professeur extraordinaire. Le Dr Eric Martin a aussi repris, de M. le professeur Edouard Frommel, la pharmacologie générale pour les dentistes.

Les chaires de clinique gynécologique et obstétricale et de clinique et policlinique dermatologique et syphilligraphique ont été repourvues, la première par la nomination de professeur

ordinaire de M. le Dr Hubert de Watteville, la seconde par la désignation de M. le Dr Werner Jadassohn en qualité de professeur extraordinaire.

M. le Dr Fernand Châtillon, jusqu'ici chargé de cours, a été nommé professeur extraordinaire de policlinique obstétricale et gynécologique. Deux chargés de cours viennent enfin compléter le tableau de ces remplacements et innovations, M. le Dr Jean-Jacques Mozer pour la clinique médicale propédeutique et M. le Dr René Mach pour l'endocrinologie médicale. Mentionnons encore les nouveaux privat-docents: M. le Dr Pierre Duchosal pour la cardiologie, M. le Dr Pierre Favarger pour la chimie physiopathologique, et M. le Dr Robert Junet pour la médecine interne.

A l'Institut de Médecine dentaire, la succession de M. le professeur Pfaeffli a mis à la tête du collège des professeurs M. le Dr Paul Guillermin et a entraîné la nomination d'un nouveau professeur ordinaire pour les couronnes et appareils à ponts, M. le Dr Etienne Fernex.

Quant à la Faculté de Théologie, sa vie s'écoule selon un rythme plus paisible, encore qu'elle participe pour une part notable à l'activité générale de l'Université. Son conseil de Fondation a fait des efforts méritoires pour que ses professeurs soient traités sur le même niveau que leurs collègues qui émargent au budget de l'Etat. Et il n'est que de voir ses maîtres au travail, dans leurs multiples occupations, pour se rendre compte que ses méthodes ont bien souvent devancé celles de ses cadettes, qu'elle a les mérites et les avantages d'une école à la fois scientifique et pratique et qu'elle rayonne bien au delà des limites de notre petit pays. Nous n'en donnerons pour preuves, sur le plan universitaire, que les conférences de M. le professeur Rochedieu et de M. le Dr Louis-Frédéric Jaccard, dans le cadre des conférences générales, la célébration du centenaire de la mort d'Alexandre Vinet par l'Université et la Société d'histoire et d'archéologie, le 9 mai, au cours de laquelle M. le professeur Auguste Lemaître s'est joint à M. le professeur Pierre Bovet pour exposer la pensée de ce grand chrétien, et, sur le plan extérieur, que la place éminente que tiennent ses professeurs dans le monde et dans l'Eglise. La liste des privat-docents de la Faculté de Théologie s'est enrichie du nom de M. Goro Mayeda.

Les étudiants qui sont ici présents pensent peut-être, en m'écoutant, que l'Université a fait beaucoup de choses pour que leur alimentation intellectuelle, scientifique, didactique, soit complète — peut-être même un peu trop — que leur existence ne s'écoule pas tout entière sur les bancs des auditoires ou dans les laboratoires et qu'ils ont besoin aussi d'autres espèces de nourritures, au sens propre et figuré. Je ne suis pas sur ce point totalement en désaccord avec eux et je me hâte d'ajouter que nos préoccupations à leur sujet ne se bornent pas à leur dispenser un enseignement savamment organisé. Il faut qu'ils se trouvent dans des conditions favorables à le recevoir. Tout d'abord, et je ne fais ici que me répéter, nos étudiants sont nombreux, même très nombreux pour nos capacités d'absorption. De ce fait, il est bien probable qu'ils se trouvent parfois un peu entassés, serrés même, dans les salles de cours et les laboratoires. Nous avons déjà dit ce qui a été fait pour diminuer ces inconvénients. Mais aussi ils perdent du temps en démarches et en attentes au début des semestres. Et, surtout, dans certains exercices très fréquentés, le contrôle de chacun d'eux et les corrections de leurs travaux sont devenus difficiles. Ces obstacles à un rendement total ne sont pas particuliers à Genève. Ils sont signalés un peu partout, et souvent même beaucoup plus que chez nous, à cause de l'affluence extrême des jeunes gens en quête de hautes études.

Ce qu'il y a de plus fâcheux c'est que les demandes pour les semestres à venir sont si considérables qu'elles ne pourront pas toutes être satisfaites, en tout cas dans les laboratoires des Facultés des Sciences et de Médecine. Nous sommes arrivés à une situation qui nous oblige à arrêter pour ces Facultés le nombre des immatriculations futures.

Nous ne pouvons faire autrement si nous voulons garantir à nos étudiants des conditions de travail acceptables. Mais nous ne sommes pas partisans pour cela d'un malthusianisme des professions libérales. La volonté de s'instruire est si grande et les besoins d'une préparation sérieuse à des carrières dont un bon nombre de pays ont un besoin impérieux sont si indispensables que la mission de la Suisse apparaît pins importante que jamais dans ce rôle de dispensatrice indépendante et objective de la culture. Tous nos efforts doivent donc tendre à faire disparaître — ou tout au moins à atténuer — les restrictions auxquelles

nous sommes encore soumis et dont nous avons pleine conscience.

Et puis que pensent nos étudiants de nos méthodes? Nous ne sommes pas toujours très bien renseignés à ce sujet et l'on ne peut pas dire que leurs opinions soient absolument claires, motivées ou pertinentes, alors même que les critiques qui nous parviennent ne nous laissent pas indifférents.

Nous savons parfaitement bien que si l'Université est, selon son appellation même; une communauté, elle éprouve des difficultés incontestables à réaliser cet idéal.

Telle qu'elle nous apparaît, l'Université est actuellement une société d'êtres pensants nombreux, et impartir à tous ses membres un seul et même esprit serait une entreprise téméraire et du reste peu souhaitable. Tout d'abord, les conditions de vie et de travail de nos étudiants les compartimentent et les dispersent. Leurs volontés propres et leurs affinités opèrent la même disjonction.

Lorsque nous tentons de les réunir, nous éprouvons de leur assemblée une impression de masse sans doute entraînante et joyeuse, mais pas beaucoup plus significative que cela. Cela ne veut pas dire que la soirée de bienvenue que nous avons organisée pour les nouveaux étudiants, et à laquelle se sont également trouvés beaucoup d'anciens, le 12 novembre 1946, à la Comédie mise obligeamment à notre disposition par son conseil d'administration et son directeur, n'ait pas été une réussite. La troupe de la Comédie nous a fait le plaisir d'une pièce de Musset, La nuit vénitienne, dont la grâce et la subtilité ont été considérées d'un côté comique qui n'était pas, je crois, dans les intentions de son auteur. Mais les artistes qui se sont fait entendre, Mlle Jeanne-Marie de Marignac, harpiste, M. André Pepin, flutiste, Mlle Liliane Bertinotti, pianiste, MM. Roger Elminger, violoniste, et Daniel Kuhne, violoncelliste, ont été largement couverts, comme les acteurs, d'applaudissements.

Les deux groupements d'étudiants des Etats-Unis, de Smith College et de l'Université de Delaware, ont montré comment ils entendaient la camaraderie en nous offrant, rare jouissance, l'exécution au Casino de Saint-Pierre, le 5 décembre 1946, par la troupe française des Francs Alleux de l'Annonce faite à Marie, de Paul Claudel. Les étudiants de la Faculté de Théologie ont

répondu à cette attention en jouant le Mystère d'Abraham, de Fernand Chavannes, une première fois lors du Noël universitaire traditionnel de l'Association chrétienne d'étudiants et une seconde fois au Casino de Saint-Pierre, le 11 février 1947, pour nos hôtes américains. Ce sont là les preuves d'une saine émulation et d'une entente réjouissante.

Les étudiants de toutes les Facultés ont suivi avec attention notre séance de rentrée et nos cours généraux. Ils ont participé, chaque fois qu'ils en ont été requis, aux commémorations universitaires et aux leçons inaugurales, aux manifestations en l'honneur des professeurs qui se retirent.

Ces occasions de collaboration et de contact. nous sont précieuses. Mais elles ne suffisent pas à faire de notre institution une collectivité consciente. Cette prise de conscience s'opère beaucoup plus facilement au sein des sociétés et ries groupements qui se partagent les préférences et les tendances des hôtes de notre maison, sociétés nationales et déjà anciennes et sociétés nouvelles, groupements par Facultés et écoles telles l'Association des élèves de l'Ecole d'Interprètes ou la Masse des étudiants de l'Ecole d'Architecture, qui sont également de création récente, groupements techniques et. scientifiques, etc.

Les deux aumôniers, protestant et catholique, M. le pasteur Jacques de Senarclens et. M. l'abbé Edmond Chavaz nous ont souvent conviés à prendre hart aux réunions des associations religieuses dont ils s'occupent et qui ont été très vivantes.

Et nous n'oublions pas non plus les associations qui unissent les étudiants anciens aux actuels et contribuent à maintenir autour de nous une ambiance favorable. L'Association des anciens étudiants a certainement une grande tâche à accomplir pour développer nos relations et conserver nos amitiés. Nous souhaitons qu'elle se réorganise et reparte pour une nouvelle étape, suivant en cela l'exemple donné par son trésorier, M. Walter Haccius, qui se donne tant de peine pour tendre et étendre le réseau de flOS relations amicales.

Tout cela démontre que nos étudiants savent parfaitement bien donner à leurs occupations et à leurs préoccupations le sens et le milieu qui correspondent à leurs mentalités multiples et diverses.

Il est cependant désirable qu'une concentration se produise entre tous ces mouvements, non pas par une unification, mais par une fédération, tout d'abord pour que l'hospitalité académique soit accueillante pour ceux qui ne sont pas de Genève, et puis pour que tous se sentent vraiment participants à une même oeuvre. Ensuite, que des échanges de vues, une pénétration plus intime se fassent des personnalités et des cultures qui se trouvent réunies ou représentées sous le même toit.

Les moyens ne manquent pas pour accentuer ce rapprochement et cette collaboration. Je ne suis pas assuré qu'il faille les chercher dans des tâches administratives qui sont le lot de nos organismes réglementaires mais bien dans la gestion des intérêts de tous genres qui appartiennent certainement aux étudiants.

C'est dans ce but que l'Association générale a été créée et c'est par un intérêt plus direct donné à sa tâche, un appui prêté à son comité, une compréhension plus nette de ses devoirs, que la communauté que nous voulons trouvera son expression et sa réalité.

Vous pensez peut-être que l'Association générale comme l'Université ont le tort de commencer par prélever sur tous des cotisations dont le total ne cesse de s'élever. Mais songez qu'il s'agit là, pour une bonne part, de contributions à des entreprises qui se proposent votre bien ou celui de vos camarades et que le lien lè plus étroit qui puisse vous unir est celui de la solidarité. C'est sous cet aspect qu'il faut considérer la Caisse maladie, que gère avec dévouement un comité composé de MM. les professeurs Lendner et Terrier, ainsi que de M. le professeur Pierre Gautier, médecin-conseil. C'est dans la même pensée que les étudiants de toutes les Universités suisses participent à l'entretien de cette oeuvre magnifique qu'est le Sanatorium universitaire, créé par l'initiative du Dr Vauthier.

Si des examens plus poussés vous sont demandés pour prévenir la maladie, votre intérêt majeur n'y est point étranger. Et vous vous associez chaque année avec une générosité digne d'éloges à la vente du timbre de l'Entr'aide universitaire internationale.

Dans cet ordre de la solidarité, le Comité de l'Association générale a bien voulu étudier un projet qui consisterait à reprendre le versement d'une partie de l'ancienne taxe de compensation

instituée pendant la guerre et à la faire servir à l'augmentation des ressources de l'Office d'entr'aide géré, sous la direction du professeur Briner, par les mandataires des étudiants. Ceci acquis, une réorganisation de cet Office s'imposerait et le comité de l'A.G. a déjà, dans ce but, conçu et rédigé, à titre d'indication, un nouveau statut.

Les étudiants pourraient alors attribuer une partie des fonds recueillis chaque semestre au renforcement des subsides accordés par l'Office d'entr'aide et, d'autre part, créer des bourses d'études en faveur de leurs camarades suisses et étrangers. Actuellement, un grand nombre d'étudiants des pays atteints par la guerre désirent poursuivre leurs études en Suisse, et d'autres Universités que la nôtre leur ont offert des possibilités de séjour et de travail.

Toutefois, pour qu'une entreprise de ce genre prenne corps, pour qu'elle ait des chances de gagner l'appui de l'Etat, il était nécessaire qu'elle obtienne la libre adhésion des étudiants. C'est aujourd'hui chose faite puisqu'une assemblée générale, convoquée le 28 mai dernier à l'Aula, par une très forte majorité a approuvé les propositions du comité de l'Association générale. Nous félicitons les étudiants de cette décision généreuse qui, mieux que toute autre initiative, les groupera sous l'égide de la confraternité et marquera sans aucune doute le début d'une oeuvre qui leur fera honneur.

L'Association générale s'efforce d'établir une meilleure liaison entre tous ses membres et entre eux et l'Université, par son organe Les Feuillets universitaires. Si ses articles lui valent, comme à notre maison, certaines critiques, il faut les accepter comme un motif de contrôle salutaire. L'A.G. représente aussi le corps des étudiants dans ses relations extérieures et entretient avec les compagnies analogues de Suisse et de l'étranger des rapports parfois mouvementés, souvent aussi générateurs de vraies amitiés. L'heure des étudiants, que dirige à la Radio M. Jean Henneberger, nous en apporte les échos et nous instruit en nous amusant.

Pour l'accueil d'hôtes étrangers à Genève, pour les échanges, les visites, les voyages, l'A.G. a aussi son rôle à jouer, et un rôle important.

Pour les étudiants nationaux, les séjours hors de Suisse ne sont pas très faciles. L'Angleterre s'est déclarée prête à des

échanges de jeunes professeurs et offre des possibilités d'occupation à des étudiants suisses. L'Université de Paris met libéralement deux bourses à notre disposition. D'autres sont annoncées pour la Suède et par le Rotary Club, et la Hollande serait très désireuse d'entrer aussi dans la voie des échanges.

Ce sont bien fit des domaines où le concours des étudiants nous est utile. Il en est encore bien d'autres où la collaboration avec les professeurs est susceptible de s'intensifier. L'échange des idées, la recherche des moyens, l'étude des problèmes pratiques ou théoriques, procureront autant d'occasions de compréhension mutuelle qu'il faut se garder de négliger.

L'Université ne perd pas non plus de vue l'aménagement plus large des conditions de la vie de ceux qui lui appartiennent. Et là encore l'Association générale est déjà et peut encore plus devenir l'agent de ses interventions. Il est évident qu'il est impossible de combler d'un seul coup les voeux, du reste légitimes, qui nous parviennent. Nous ne pouvons doter tout de suite nos annexes des installations souvent fastueuses qui existent parfois dans d'autres Universités, maisons des étudiants, restaurants universitaires, salles de réunions et de sport, etc. Mais ce qui est possible, c'est tout d'abord d'atténuer les difficultés matérielles que beaucoup d'étudiants rencontrent, puis d'utiliser à plein ce qui existe.

En accord avec le comité de l'Association des Anciens Etudiants, nous avons récolté le plus d'offres possible de chambres et insisté pour que les prix ne suivent pas la courbe ascendante des logements. Je dois dire qu'une grande bonne volonté nous a été témoignée et que, si les prix ne sont pas particulièrement bas, il ne semble pas qu'ils aient subi de majoration exagérée. Il existe encore à Genève des pensions alimentaires dont les tarifs sont modérés. Les renseignements qui nous sont parvenus à ce sujet donnent des chiffres qui sont un peu au-dessus de ceux de restaurants d'autres universités de notre pays, mais pas trop. Il n'en reste pas moins qu'une table d'étudiants répondrait mieux à l'attente et qu'elle aurait de bons effets sur la cohésion de l'ensemble. Nous ne renonçons pas à tendre à cette réalisation.

Nous possédons cependant des institutions qui rendent de grands services, même si leurs possibilités sont actuellement arrivées à leur maximum. Il s'agit de la Maison internationale

des étudiants de la rue Daniel-Colladon et du Foyer des étudiantes de la rue Henri-Dunant, la première dirigée par Mlle Violette Balmer, la seconde par Mme Jeanne Champ-Renaud. L'une et l'autre ont droit à de vifs éloges car elles accomplissent leur mission avec autant de conscience que de coeur et en font de véritables ministères. La Maison internationale des étudiants nous est un auxiliaire devenu indispensable. Le Département des Travaux publics l'a pourvue cette année d'un chauffage central et. M. Guillaume Fatio ne cesse de veiller à sa gestion. Cela veut dire qu'elle est en de bonnes mains.

Notre domaine de Varembé (campagne Bigot) est-il exploité comme il pourrait l'être pour notre usage? Il y aura encore beaucoup à faire pour qu'il retrouve quelque chose de sa splendeur d'antan, ses jardins à la française, ses eaux, sa glacière et son pavillon chinois. Nous n'en demandons pas tant. Mais ses maisons nous intéressent. En attendant (le meubler les salons de la grande maison selon le style de leur décoration, la petite maison et le baraquement de bois qui a longtemps été loué à un club sportif font l'objet d'un dessein fort intelligent du comité de l'A.G. Il s'agirait d'y établir des logements ott des cantonnements pour les étudiants de passage ou en séjour cet été à Genève, et l'on sait qu'une crise terrible et qui ne nous laisse pas froids sévit sur l'habitation à Genève. La Ville de Genève est disposée à louer, pour une redevance modique, des lits. Des meubles ont été prêtés par un professeur. Il en faut encore d'autres et des draps. Et pour devenir hôtelière, l'Association requiert une aide qui ne lui sera pas, je l'espère, refusée. -

On le voit, l'Association générale est digne d'attirer à elle les dévouements. Elle peut être le centre de ralliement des étudiants, leur commune entreprise, même si elle se nourrit actuellement de plus d'espoirs que de substance.

En tout cas, sa section sportive est, elle, bien dans le mouvement. Ses programmes d'exercices sont fournis et ses concours nombreux. Elle voudrait toutefois compter parmi ses adptes un plus grand nombre de participants et posséder de meilleures salles de gymnastique et des stades. Elle peut compter en revanche sur le zèle infatigable du maître des sports, M. Jean Brechbühl, le compétent animateur de ses travaux corporels et aussi l'inspirateur de son excellent esprit auquel contribue la commission présidée par M. le Dr Walthardt. Et le Club alpin

académique, formé de gens expérimentés autant que sans doute prudents, convie en cette saison les amis de la montagne à prendre part de leurs joies et de leurs prouesses.

Le développement futur de l'Université devra donc comporter, sur le plan matériel, les installations destinées à procurer aux étudiants le milieu dans lequel leur vie s'adaptera mieux aux exigences de leur travail, le lieu de leurs rencontres et de leurs expériences. Mais nous n'attendons pas ce rééquipement pour qu'ils se sentent chez nous à l'aise, encouragés et soutenus, conviés à agir pour le bien commun et eux-mêmes entraînés par l'effort de sa recherche.

MESDAMES, MESDEMOISELLES ET MESSIEURS,

Est-ce bien toute la vie de l'Université pendant cette dernière année que je viens de décrire? En aucune façon. Ce sont des faits, des idées, des projets, des voeux, notre collectivité saisie dans ses manifestations visibles, perceptibles, on peut même dire extérieures.

Sa vie réelle est profonde et cachée. Parfois nous croyons pouvoir définir, deviner, imaginer l'esprit qui l'anime ou devrait l'animer. Mais ce sont dans nos réactions personnelles de professeurs et d'étudiants que cet esprit prend naissance. Et pour connaître ces réactions, il nous faut des témoignages. Témoignages immédiats dont nous recueillons certaines informations. Témoignages qui résulteront d'une plus mûre réflexion, d'une expérience plus longue et qui nous parviendront peut-être un jour.

Sommes-nous donc sur la bonne voie? Nous autres professeurs répondons-nous pleinement à l'attente de nos étudiants? Sommes-nous dignes de la confiance qu'ils mettent en nous? Et vous étudiants, avez-vous conscience des missions auxquelles l'enseignement supérieur vous destine? Ce sont là des questions que nous devons, les uns et les autres, nous poser tous les jours.

Certes, nous n'obtiendrons pas des réponses précises ou définitives et notre doute à ce sujet sera constant. Il ne doit cependant pas engendrer une inquiétude paralysante mais au contraire exciter notre effort. L'essentiel de notre tâche présente est dans le travail, et ce qu'il nous est donné de connaître de ce travail nous laisse tout de même une impression réconfortante. Oui notre maison travaille intensément. Elle est à l'oeuvre tous les jours dans ses auditoires, ses laboratoires, ses séminaires et ses bibliothèques. Elle est à l'oeuvre dans les recherches personnelles et les méditations de chacun d'entre nous. Elle est à l'oeuvre par l'échange des idées qu'elle provoque, les dévouements qu'elle suscite et les expériences qu'elle sollicite.

Elle est à l'oeuvre pour former une jeunesse ~ laquelle nous proposons des méthodes et des connaissances et qui en fera l'usage vers lequel notre propre exemple et notre tradition l'auront dirigée. Une jeunesse qui, à son tour, marchera dans les voies de la science et de l'action.

Nous mesurons donc à cet inconnu de l'avenir notre responsabilité. Mais nous ne renonçons pas à donner une impulsion décisive à des vocations qui demeureront l'honneur de l'Université de Genève. Vocation au culte de la vérité dont la science est nourrie. Vocation au service du pays pour lequel elle nous arme. Vocation au progrès des valeurs humaines qu'elle nous apprend à respecter. Vocations de paix, de charité et d'accord par lesquelles et pour lesquelles elle existe et dont elle ne peut être disjointe.

C'est dans cette foi que nous poursuivrons notre course.