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ALLOCUTION DU RECTEUR

M. le professeur Eric MARTIN
A LA SÉANCE DU DIES ACADEMICUS
le 7 juin 1961
MESSIEURS LES REPRÉSENTANTS DES AUTORITÉS, MESDAMES ET MESSIEURS. CHERS ÉTUDIANTS,

MÊME pour un public composé de professeurs, d'élèves et d'amis de l'Université, l'énumération des faits, petits et grands, qui jalonnent l'année académique est une épreuve fastidieuse. Mon prédécesseur, le recteur Courvoisier, s'était l'an dernier dégagé de cette tradition et, au risque d'encourir quelques reproches, je m'en vais, cette année encore, suivre son exemple. La brochure du Dies qui paraît chaque année contiendra, comme d'habitude, un exposé beaucoup plus complet ainsi que les rapports des prix de concours et l'éloge (les nouveaux docteurs honoris causa.

Succédant à un recteur qui s'est voué complètement à sa tâche et qui a pu entraîner derrière lui, pour la préparation puis la célébration du IVe centenaire, une université unanime, maîtres et élèves, nous avions à nous inspirer de cet exemple et à chercher à maintenir cet élan.

Mon intention est de vous faire part de quelques-unes des préoccupations essentielles des autorités universitaires et de vous parler de quelques problèmes importants qui se sont posés à elles ait cours d'une année qui m'a parti particulièrement chargée.

Quoiqu'il en soit, une des grandes satisfactions du recteur est de se trouver, chaque mardi à 17 heures, à la séance du Bureau du Sénat en face de collègues animés du plus pur esprit académique et de pouvoir discuter dans une atmosphère d'amitié et de compréhension les questions relatives à la vie de notre maison.

On ne soulignera jamais assez le dévouement, la bonne humeur, et l'intérêt manifesté pour la chose universitaire, par le personnel de la maison, aux secrétariats, à la trésorerie et à la conciergerie. Nos collaborateurs méritent qu'on les en remercie.

Il me presse de saluer ici les représentants des institutions et associations qui représentent les amis de l'Université, car l'Université a bien besoin de compter sur ses amis. En effet, trop souvent on discute la manière dont elle accomplit sa tache, on lui reproche des exigences démesurées et on lui conteste le rôle essentiel qu'elle prétend assumer dans la formation des élites à un moment pourtant où, venant des quatre coins du monde, les élèves se pressent sur les bancs de ses amphithéâtres, témoignage de son rayonnement et de l'attrait qu'elle exerce. On juge sévèrement le comportement des étudiants en rendant responsables les autorités universitaires de l'indépendance, du non-conformisme et des exigences d'une jeunesse qui appartient, pour une bonne part. aux milieux les plus traditionnels de la cité et du pays.

Parmi les représentants des autorités, je désire saluer la présence de M. le Conseiller d'Etat Alfred Borel, dont l'amitié est réconfortante et qui est disponible sans restriction lorsqu'il s'agit de lui parler de notre Université, de son présent et de son avenir. Sans lui nous serions souvent découragés en nous demandant qui, en haut lieu, prendra la défense de notre maison.

Nous avons eu à déplorer, au cours de cette année universitaire, le décès de:

M. Pierre Arminjon, professeur honoraire de l'Université;

M. Fernand CHATILLON, ancien doyen de la Faculté de médecine, professeur honoraire de l'Université;

M. René JACCARD, docteur en médecine dentaire horions causa;

M. Georges SCELLE, professeur honoraire de l'Université.

Nous gardons le souvenir de ces collègues qui ont servi fidèlement notre Alma Mater et on me permettra d'avoir une pensée spéciale à la mémoire du doyen Chatillon dont le dévouement était égal à la modestie.

Nous avons enregistré la démission de:

M. Marc LAMBERCIER, professeur de psycho-motricité à l'Institut des sciences de l'éducation. Le Conseil d'Etat a prolongé son activité jusqu'à la fin de l'année universitaire 1960/61;

M. Arnold HOECHEL, professeur et chef d'atelier d'urbanisme à l'Ecole d'architecture;

M. Marcel GYSIN, professeur ordinaire de minéralogie, de pétrographie et d'étude des gîtes métallifères à la Faculté des sciences;

de M. François ACKERMANN, professeur ordinaire de prothèse à l'Institut de médecine dentaire;

de M. Jean MEYNAUD, professeur extraordinaire de sciences politiques à la Faculté des sciences économiques et sociales; et de M. Adrien ROBINET DE CLÉRY, professeur extraordinaire de droit constitutionnel comparé à la Faculté de droit.

Ont été nommés professeurs honoraires:

MM. Willy TAPPOLET, Alexandre Soloviev, Marcel GYSIN et Adrien ROBINET DE CLÉRY.

Si l'Université est appauvrie par le départ de ces éminents maîtres, elle a acquis des forces nouvelles par la nomination de:

M. Augustin LOMBARD, nommé par appel, professeur ordinaire de géologie et de géographie physique à la Faculté des Sciences et professeur attaché de géologie à l'Ecole d'Architecture;

M. Ernest STUECKELBERG, nommé professeur ordinaire de physique théorique;

M. Walther HABSCHEID, précédemment professeur extraordinaire, nommé professeur ordinaire de droit civil et de procédure civile allemande;

M. Jean LEYMARIE, nommé professeur ordinaire d'histoire de l'art;

Mlle Germaine DUPARC, nommée professeur de pédagogie pour l'éducation de la petite enfance à l'Institut des sciences de l'éducation;

M. Marc SAUGEY nommé chef d'atelier d'urbanisme à l'Ecole d'architecture;

M. Henri CALSAT, nommé professeur d'urbanisme à l'Ecole d'architecture;

M. Ernst HEER, nommé par appel professeur ordinaire de physique nucléaire expérimentale.

M. Marc VUAGNAT, nommé par appel professeur ordinaire de minéralogie, pétrographie et études des gîtes métallifères;

M. René VERNIORY nommé par appel professeur extraordinaire de paléontologie des invertébrés et de micropaléontologie;

M. Michel AUCOUTURIER nommé professeur extraordinaire de langue et littérature slaves;

M. Bernard GLASSON, nommé professeur extraordinaire de matière médicale et prescription magistrale;

M. Georges BÉNÉ, nommé professeur extraordinaire de spectroscopie hertzienne;

M. Christoph HAURI, chargé de cours de philologie germanique;

M. Erwin WILDI, chargé de cours de neuro-pathologie;

M. Henri GRANDJEAN, chargé de cours à l'Institut des sciences de l'éducation;

M. René JOTTERAND, chargé de cours à l'Institut des sciences de l'éducation;

M. Christian DOMINICÉ, chargé de cours pour l'enseignement d'éléments de droit international public et pour le droit constitutionel comparé.

MM. Jean DESHUSSES et Adrien JAYET, chargés de cours, ont reçu le titre de professeur associé à la Faculté des sciences.

Dans la catégorie nouvellement créée des professeurs invités, nous avons accueilli:

M. Torleif ERICSON, chargé d'un cours sur la théorie des noyaux, au semestre d'hiver 1960/61;

M. Ronald MERMOD, chargé d'un cours de physique nucléaire expérimentale, pour l'année universitaire 1960/61;

M. Jacques PRENTKI, chargé d'un cours sur la théorie des particules étranges, pour le semestre d'été 1961;

enfin M. Vassili KIORTSIS, a été nommé professeur invité pour la suppléance de la chaire de zoologie au semestre d'été 1961.

Nous saluons encore la nomination de quelques privat-docents:

MM. Daniel KRUMMENACHER, Rodolphe KASSER, Roger VUARIDEL, Janos TOTH, Robert BRUN, Pierre DUCOMMUN, Clément FLEURY, Marcel JUNOD et Emile-Charles BONARD.

Nous souhaitons une très cordiale bienvenue à ces nouveaux professeurs, chargés de cours et privat-docents qui enrichissent notre Université d'enseignements nombreux imposés par le développement des connaissances humaines.

Distinctions.

Le professeur André MIRIMANOFF a été nommé docteur honoris causa de l'Université de Montpellier;

le professeur Marcel RAYMOND, docteur honoris causa de l'Université de Borne.

Le professeur Emile GUYÉNOT a reçu le Prix Henri Poincaré pour l'ensemble de son oeuvre.

Au Professeur Kitty PONSE, a été accordé le prix de la Fondation Otto Naegeli, au montant de 100.000 francs.

Dons et legs.

M. Nessim HABIF a légué à l'Université une somme de 500.000 francs, charge à elle de décerner chaque année deux prix mondiaux, l'un attribué successivement à la médecine, aux lettres, aux sciences et aux études internationales, le second à l'auteur d'une invention dans le domaine de l'instrumentation chirurgicale.

M. Louis-Ernest SCHNEITER a légué les deux dixièmes de sa fortune, soit une somme de près de 400.000 francs aux Facultés de médecine et de droit.

La société coopérative Migros, à Genève, a fait un don de 10.000 francs au fonds des publications dc la Faculté des sciences économiques et sociales.

Madame Eugène BLOCH a créé un prix biennal de 400 francs destiné à un chercheur de l'Institut de Pathologie.

Nous avons reçu le buste du Professeur Auguste d'ETERNOD, de sa famille et de Mme Pfaeffli un médaillon de profil du professeur François PFAEFFLI.

Nous exprimons notre reconnaissance à tous ces généreux donateurs.

Les problèmes de notre Université.

L'Université, la plus grande entreprise de notre cité, a besoin d'ajuster son organisation aux exigences de ses 3.600 étudiants et de ses enseignements toujours plus nombreux. La création de deux postes, un de secrétaire général et un de secrétaire, permettra de mieux répartir le travail qu'accomplissait une seule personne, en l'occurrence M. Hermann BLANC, à la tâche depuis 24 ans avec un dévouement inlassable et qui devient premier titulaire du poste de secrétaire général.

Le secrétaire général secondera d'une manière efficace et durable un recteur, dont le règne «magnifique» est éphémère, et s'emploiera à donner une certaine continuité à la politique universitaire et à l'étude des problèmes essentiels.

Quant au secrétaire, il assurera la coordination des services administratifs, recevra les étudiants et fera face aux exigences de la besogne quotidienne.

Le Conseil académique est entré en activité; il est fondé dans le but d'établir entre l'Université et les différents milieux de la cité un contact plus étroit. Présidé par M. André Fatio, que nous remercions du sérieux qu'il apporte à sa tâche, il est composé de Mme Bron-Stalet, présidente de la Fondation «Pour l'Avenir», de MM. Roger Firmenich, industriel, André Rivoire, architecte, Louis Maire, économiste, Eugène Suter, secrétaire syndicaliste, Edouard Berthier, juge à la Cour, Raymond Racine, représentant des anciens étudiants, Olivier Reverdin, journaliste et professeur, du recteur, du vice-recteur, du recteur sortant de charge, le professeur Jaques Courvoisier, et du secrétaire général, M. Hermann Blanc.

Les problèmes académiques abordés «du dehors» par ce Conseil sont envisagés selon une optique parfois différente de celle des professeurs et des étudiants, mais souvent complémentaire.

En moins de six mois d'activité, le Conseil académique a déjà fourni la preuve de son utilité. On peut prévoir l'influence considérable qu'il pourra exercer dans le futur. Son pouvoir est uniquement consultatif, son autorité est morale mais elle est grande en raison de la personnalité de ses membres. Toutes ses propositions sont discutées par le Bureau puis par le Sénat universitaire qui demeure, sans aucune limitation de ses prérogatives, l'autorité suprême de l'Académie.

Le problème de la sélection des étudiants ne sera jamais facile à résoudre.

La connaissance préalable du français, une exigence accrue à l'égard des diplômes étrangers, l'élimination des amateurs qui ne passent pas leurs examens dans les délais réglementaires, sont des mesures introduites systématiquement et qui portent déjà leurs fruits.

La proportion des étudiants étrangers, qui se situe aux environs de 60%, est trop élevée si l'on veut maintenir dans notre maison une tradition nationale et permettre l'assimilation des étudiants que nous envoient près de 50 nations. Les demandes d'immatriculation d'étudiants étrangers sont toujours aussi nombreuses. Les mesures les plus rigoureuses n'auront d'effet que si, dans chaque faculté, on est décidé à éliminer l'étudiant amateur qui, dans certains cas pourtant, pourrait avoir un

meilleur rendement s'il était mieux encadré. La réduction du nombre des étudiants étrangers est également imposée par l'afflux attendu de volées nombreuses d'étudiants suisses nés pendant les années de la guerre.

Afflux d'étudiants: pénurie de locaux.

Tout d'abord pénurie de logements pour étudiants. Malgré l'ouverture du Centre Universitaire Protestant, l'agrandissement envisagé du Centre catholique, l'inauguration prochaine de la Fondation Patino, nous aurons cet automne à faire face à une situation aussi sérieuse que l'an dernier. Grâce à la compréhension de l'Etat, un bureau de logement s'est ouvert au début de juin. Le préposé à cet office, M. Demartin, aura pour tâche de faire l'inventaire de nos possibilités et d'établir des relations avec des logeurs ei. les étudiants pour assurer l'observation d'une convention qui tienne compte des besoins légitimes des uns et des autres.

A la suite d'une action commune des autorités universitaires, de l'assistante sociale et des étudiants, nous avons pu obtenir l'an dernier un grand nombre de chambres mises à disposition par des personnes qui, d'ordinaire, ne recevaient pas de pensionnaires. Emues par la gravité de la situation et dans un bel esprit de solidarité, elles avaient eu un geste que nous leur demandons instamment de renouveler cette année. Le bureau de logement fera le nécessaire pour qu'elles n'aient pas à regretter leur générosité.

La construction de la cité universitaire a commencé il y a un mois et elle se poursuivra sans heurt de manière à être terminée en automne 1963, si nous pouvons compter sur l'appui sans réserve que l'Etat a bien voulu nous promettre.

Un projet de construction d'hôtel pour étudiants est prêt, seul le terrain n'est pas encore trouvé. Une demande a été présentée dans ce but à nos autorités.

Pour ceux qui n'en auraient pas entendu parler, je signale que le Restaurant universitaire s'est ouvert le 17 avril!

Pénurie, ensuite, de locaux universitaires.

Le Musée d'Histoire Naturelle, lorsque ses collections seront aménagées dans le nouveau bâtiment de Villereuse, mettra, dans trois ans au minimum, son bâtiment à la disposition de l'Université, principalement au bénéfice des sciences morales.

On pourra ainsi créer des salles de séminaires, des bureaux de professeurs, des lieux de travail, en tenant compte des besoins actuels de l'Université et de la tendance de l'enseignement moderne où les grands «amphis» doivent être complétés par un enseignement en petits groupes, les élèves y étant plus actifs et leur participation mieux contrôlée.

Dans l'aménagement du Musée d'Histoire Naturelle, il faudra également prévoir de la place pour les locaux administratifs, le secrétariat des doyens et les bureaux de l'Association Générale des Etudiants.

Dès l'automne, grâce à l'initiative de M. le Conseiller administratif Bouffard qui, à maintes reprises, a manifesté son intérêt et son amitié agissante à l'égard de notre maison, grâce aussi à la compréhension et à la complaisance de M. Emile Dottrens, directeur du Muséum, une salle de travail pour 200 étudiants sera installée dans un local qui jouxte l'Université.

Enfin, une fois la Conférence du Laos terminée, l'Université pourra disposer des locaux de l'ancien restaurant universitaire pour des services administratifs, le bureau de l'assistante sociale, le sport universitaire et les services de l'organisation estudiantine.

D'autre part, dans l'intention d'y créer un club académique international, les autorités universitaires sont bien décidées à prendre possession, avec tous les égards dus aux occupants actuels, de la maison de Varembé qui lui a été donnée par John Rockefeller Jr. L'Université pourra également, dans cette maison, loger des hôtes de passage et recevoir ses invités.

Mais le programme des grands travaux nous permet des espoirs beaucoup plus importants: la construction d'une série de bâtiments destinés à l'enseignement et à la recherche et qui remplaceront ceux qui sont devenus vétustes.

C'est ainsi que la nouvelle Ecole de Chimie sera en chantier au printemps 1962, construction qui permettra d'abandonner le bâtiment actuel dont le moins qu'on puisse dire c'est qu'il a fait son temps.

Il importe que la construction du nouvel Institut d'Hygiène soit entreprise sans tarder pour permettre, en aménageant l'ancien bâtiment à l'intention de la minéralogie et de la géologie, le développement du centre scientifique des bords de l'Arve qui comprendra, outre le nouveau bâtiment de la Physique agrandi, l'Ecole de Médecine affectée à la botanique, à a zoologie etc.

Dans combien d'années de nouvelles constructions coûteuses pourront-elles bénéficier d'une aide fédérale? Nous ne le savons pas. Une proposition a été faite au Conseil national et le problème est actuellement en discussion; il a reçu un accueil favorable des autorités universitaires cantonales.

L'accès de l'Université aux élèves doués.

Nous devons ouvrir plus largement les portes de notre Université aux élèves doués, quelle que soit la situation économique de leurs parents. Il s'agit d'une mesure de justice sociale et de satisfaire le besoin de notre pays en cadres qualifiés.

Le problème à résoudre a deux aspects:

psychologique: il faut persuader les milieux ouvriers et les milieux d'artisans ou d'ouvriers qualifiés, de l'intérêt que représentent pour leurs enfants les études supérieures; ces milieux ont besoin d'être renseignés, car ils connaissent fort mal ce qu'est la formation universitaire et les débouchés qu'elle peut offrir;

—financier: les élèves intelligents et travailleurs doivent recevoir une aide financière sous la forme d'une bourse qui leur permettra de faire, sans préoccupation matérielle excessive, des études adaptées à leurs talents.

La bourse est un honneur qui vous échoit, aussi doit-on, au maximum, réduire les démarches administratives que son attribution implique, et assurer la reconduction régulière de l'aide matérielle si l'élève fait preuve de persévérance dans son effort.

C'est dans cet esprit que travaille le Département genevois de l'instruction publique, dans une expérience qui s'amplifie chaque année. Ce système peut s'améliorer, il a l'avantage d'être souple; son application est progressive; il ne sera efficace que doublé d'une action psychologique.

L'Union Nationale des Etudiants de Suisse (UNES) a mis sur pied un projet d'octroi de bourses et de prêts d'honneur, projet qui devra retenir l'attention de tous les intéressés.

Notre Université compte en outre plusieurs centaines de boursiers étrangers dont la situation est souvent difficile vu l'étroitesse du montant qui leur est accordé. La situation de

ces étudiants est connue des organisations sociales de l'Université qui font leur possible pour les aider, mais une meilleure coordination de ces services est nécessaire.

Bourses fédérales pour étudiants venant de pays en voie de développement.

Le projet fédéral accepté par les Chambres est en voie de réalisation. Dès l'automne, nous recevrons un certain nombre de candidats. Comme le problème de la sélection dans les pays d'origine est de réalisation difficile et que le temps presse, on choisira principalement, pour commencer, des étudiants déjà inscrits dans nos universités suisses, connus des professeurs et ayant fait preuve d'application et d'une bonne formation préalable.

Pour l'encadrement de ces étudiants, pour leur initiation à notre histoire et à nos institutions politiques, nous pourrons compter sur le Centre genevois pour la formation de cadres africains, créé récemment à Drize par l'Etat et dirigé par M. Henri-Philippe Junod.

Collaboration des Universités romandes.

La concurrence entre nos universités romandes peut être stimulante et tonique; elle peut être stérile lorsqu'elle compromet le travail de recherche, qu'elle nuit à l'emploi judicieux des moyens et qu'elle ne correspond pas à une utilisation des forces humaines à disposition.

Les autorités universitaires de Genève et de Lausanne se sont réunies pour étudier le problème d'une collaboration qui s'étendra aux autres universités romandes et qui est réclamée par l'opinion publique raisonnable, les cercles de l'industrie et de l'économie. Cette initiative a été élargie par des propositions de la Nouvelle Société Helvétique, qui cherche une meilleure collaboration entre Genève et Lausanne sur le plan de la culture et des arts.

Il y a deux mois, déambulant le long des trottoirs du boulevard St-Germain, je fus tiré de ma rêverie par une étudiante très nouvelle vague, qui me demandait à brûle-pourpoint: «Etes-vous fâché avec les jeunes?» En même temps que j'affirmais qu'il n'en était rien, elle me mit dans les mains une

brochure en disant: «Eh bien alors, achetez cette revue publiée par les jeunes à leur profit.» Il n'était ni courtois de refuser à une aimable étudiante, ni possible de laisser choir sur le gras du trottoir, ce fascicule immaculé que mon interlocutrice refusait de reprendre. Je m'en tirai avec cinq nouveaux francs; cette prose soit-disant juvénile, avant tout commerciale, ne valait pas vingt sous.

Mais depuis lors, à plusieurs reprises, j'ai eu l'occasion de me poser la question «Sommes-nous fâchés avec les jeunes?» Certainement pas, quand ils animent une kermesse internationale, haute en couleurs et bruyante de tous les langages de la terre. Certainement pas, quand ils préparent et organisent une réunion comme Je dernier Forum international, où Africains et Suisses ont été étonnants de franchise, de simplicité et d'amitié. Certainement pas, quand ils montent comme naguère et encore aujourd'hui un spectacle — car, tout à l'heure, le Théâtre Académique va jouer Marivaux, en l'aula de l'Université, et après une séance solennelle un peu longue, ne serez-vous pas heureux que l'on vous donne la comédie?

Nous ne sommes pas fâchés avec les jeunes lorsque, sur le plan culturel et pour rapprocher les étudiants les uns des autres, ils prennent des initiatives positives et valables.

Pour le reste, il faut reconnaître que les relations sont parfois difficiles.

Notre Université n'est plus l'Université de «papa» et c'est normal; il suffit de passer quelques instants dans les corridors au moment du quart d'heure ou de lire l'Action Etudiante, pour s'en rendre compte.

Ce n'est pas l'esprit de l'enseignement qui a changé, ni la consécration des professeurs à leur tâche; ce sont les étudiants qui sont différents, comme l'époque les a formés, comme les familles les ont vu se développer, impuissantes souvent à changer quoi que ce soit.

Et même si nous ne sommes pas toujours d'accord avec eux, si nous condamnons certaines de leurs exigences — qui, si elles étaient accordées par l'Etat, le seraient au détriment de leur indépendance; si nous craignons l'introduction de la politique de parti à l'Université, qui menacerait la tradition libérale de notre maison et son rayonnement, nous devons écouter les jeunes et chercher à comprendre leur point de vue.

Au risque d'être taxé de paternaliste, nous vous demandons cependant de comprendre, chers étudiants, que le rôle du

professeur n'est pas seulement de vous enseigner le grec, le droit ou la médecine, mais de développer harmonieusement vos qualités intellectuelles et votre personnalité.

Dans cette perspective, nous avons à faire preuve d'autorité. L'expérience que les années nous ont apportée et la science que nous avons à enseigner nous y obligent. Notre devoir est de vous instruire et les liens entre maître et élèves sont si précieux et d'une qualité si particulière qu'il ne faut pas risquer de les rompre ou de les relâcher par des procédés d'intimidation ou des manifestations collectives employées en dehors des règles du jeu.

J'ai déjà eu l'occasion de vous le répéter. Vous estimez avoir des droits, vis-à-vis de la collectivité. Elle doit favoriser la formation des cadres dont elle a besoin, mais cette collectivité —et je précise ici la collectivité genevoise et suisse, car le problème est avant tout local et national et les solutions d'emprunts ne sont pas toujours valables —doit être convaincue que les sacrifices qu'on lui demande seront faits au profit de privilégiés qui ont le sens de la dignité et de la responsabilité.

Aucun groupement humain ne peut revendiquer des droits sans s'imposer des devoirs. Cette règle s'applique particulièrement aux étudiants, à qui il a été beaucoup donné.