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Allocution du professeur Eric Jeannet

recteur
Mesdames et Messieurs,

Nous vous remercions d'avoir répondu à notre invitation et nous vous souhaitons une cordiale bienvenue.

Nous avons l'honneur de saluer personnellement:

Monsieur Pierre-Alain Delachaux, président du Grand Conseil neuchâtelois;

Monsieur Jean Cavadini, conseiller d'Etat, chef du Département de l'instruction publique;

Nous sommes honorés de la présence de:

Madame et Messieurs les représentants neuchâtelois aux Chambres fédérales;

Mesdames et Messieurs les députés au Grand Conseil neuchâtelois;

Mesdames et Messieurs les représentants des autorités communales des villes et villages du canton;

Monsieur Jean-Marc Barras, représentant de la Conférence universitaire suisse;

Madame Marie-Claude Boss-Ormond, secrétaire générale de la Conférence universitaire romande;

Monsieur André Vifian, secrétaire général du Conseil suisse de la science;

Monsieur Peter Fricker, secrétaire général du Fonds national de la recherche scientifique.

Nous sommes heureux de saluer les universités suisses, toutes représentées: Bâle, Berne, Fribourg, Genève, Lausanne, Saint-Gall et Zurich, de même que l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne.

Nous sommes sensibles à la présence que nous savons amicale aussi

des représentants des associations culturelles;

des établissements d'enseignement de la région;

de nos docteurs honoris causa;

des membres du Conseil de l'Université et du Conseil rectoral;

des représentants des associations d'étudiants.

Nous saluons la présence de Mesdames et Messieurs les professeurs, les chargés de cours, les chefs de travaux, les assistants, les collaborateurs scientifiques, techniques, administratifs et les étudiants, particulièrement parmi ces derniers ceux qui ne sont pas venus ici pour toucher un prix.

Mesdames et Messieurs,

Mon allocution aura deux parties. Dans la première, je m'efforcerai de porter un regard sur l'avenir de l'Université, en particulier celle de Neuchâtel. Dans la seconde, je dirai l'essentiel de ce que fut l'année universitaire 1981-1982.

Ce regard, à moyen terme, je le porterai sur la base de prédictions solides et non sur d'éventuels principes. A l'appui de cette prudente approche, je m'en remets à l'avertissement d'Auguste Detoeuf pour qui «il n'y a que d'immortels principes, puisque du jour où un principe meurt on s'aperçoit que ce n'était qu'un paradoxe».

Pragmatiquement, j'aborderai les deux thèmes suivants:

— l'évolution du nombre d'étudiants,

— l'évolution de la situation économique.

1. L'évolution du nombre des étudiants

Evoquer en premier lieu le nombre des étudiants, c'est souligner d'emblée la caractéristique essentielle de l'Université actuelle: son ouverture. En effet, quiconque a fait la preuve qu'il possède certaines connaissances, preuve qui administrativement repose sur la réussite d'un baccalauréat, peut être immatriculé à l'Université. Si le droit aux études n'est pas un droit constitutionnel, il l'est dans les faits. Je ne connais que trois exceptions à cet état: le numerus clausus théorique en médecine, mais qui n'a jamais été appliqué pour des étudiants suisses, l'examen médical imposé aux candidates et candidats en orthophonie —qui vise à ne pas immatriculer des personnes qui ont un défaut de prononciation ou sont victimes d'une déficience auditive — la nécessité, pour présenter une thèse de doctorat, d'avoir l'accord d'un directeur de thèse désigné par une faculté.

Ces dernières années, le nombre de nos étudiants a augmenté régulièrement, non seulement en relation avec la forte natalité qu'a connue notre pays dans les années cinquante et

au début des années soixante, mais aussi en raison de l'accès plus facile — financièrement parlant — aux études gymnasiales et surtout à cause de l'arrivée en force de l'élément féminin à l'Université. L'examen de cette évolution montre une très grande stabilité des choix faits par les étudiants, tant pour la discipline que pour l'Université. Tout au plus pourrait-on souligner une augmentation plus forte en Faculté des lettres — qui s'explique par la féminisation des études universitaires — et une augmentation relative plus marquée pour les universités de Genève et de Zurich. Cette grande stabilité, ou, mieux, cette lente évolution des tendances nous autorise à faire des prévisions à moyen terme sans risquer de nous tromper beaucoup en nous basant sur le nombre annuel des naissances. En Suisse, ce nombre qui dépassait 100000 en 1964 s'est effondré à moins de 70000 naissances en 1979. Cette évolution ne touche pas encore l'Université. On s'attend à des augmentations d'effectifs de l'ordre de 4% par année, jusqu'en 1985, puis à une stabilisation, le nombre d'étudiants étant compris entre 2300 et 2400 en 1990 pour l'Université de Neuchâtel. Cette prévision m'amène à poser deux questions:

— Avons-nous la place nécessaire pour accueillir ces étudiants?

— Avons-nous suffisamment de professeurs et d'assistants?

Concernant les locaux tout d'abord, ils seront suffisants dès que le bâtiment projeté pour la Faculté des lettres aura été construit. Les travaux pourront commencer le printemps prochain. Depuis l'ouverture du crédit, en 1981, les architectes et la Commission de construction ont élaboré le projet définitif et calculé le devis définitif. Des sondages effectués sur les Jeunes Rives ont montré qu'il était absolument nécessaire de construire sur pilotis. Cette éventualité avait été envisagée mais non retenue lors de l'établissement de l'avant-projet ayant servi de base à la demande de crédit. Pour cette raison et pour d'autres — par exemple la mise à disposition d'abris plus grands que ceux prévus initialement, une isolation thermique supérieure aux normes standards et une augmentation du coût de la construction plus élevé que celui envisagé — il est à prévoir que le crédit alloué sera dépassé. Un rapport, présentant une alternative, a été remis au Conseil d'Etat à qui il appartient de décider.

J'aimerais ici ajouter quelques mots sur le système qui a été adopté pour chauffer en commun ces nouveaux locaux universitaires et la nouvelle Ecole de commerce dont le chantier arrive à chef. Ce chauffage est basé sur l'utilisation d'une pompe à chaleur qui récupère l'énergie calorifique des eaux

claires et limpides de la station d'épuration. Le principe thermodynamique de la pompe à chaleur consiste à refroidir encore de l'eau à basse température pour produire par ailleurs de l'eau chaude; l'énergie totale, selon un principe physique bien connu, devant être conservée. Cette pompe à chaleur est dimensionnée de manière à chauffer les nouveaux bâtiments — de l'Université et de l'Ecole supérieure de commerce — au plus froid de l'hiver. A l'entresaison, le surplus de chaleur sera repoussé dans le réseau à basse température de la centrale de chauffage de la Maladière et servira d'appoint important —plus de 90% — à ce réseau à basse température.

Permettez-moi, à côté de ces considérations techniques, de rêver un peu et d'imaginer que tel Neuchâtelois, sortant de son bain et vidant sa baignoire d'eau encore chaude, aura une pensée émue pour les étudiants en lettres qui bénéficieront ainsi —très indirectement, technique oblige —d'un peu de chaleur humaine.

Il me plaît de souligner que si l'intégration urbanistique des futurs bâtiments universitaires sur les Jeunes Rives illustre bien la volonté politique souvent exprimée par le slogan «L'Université dans la cité», cette implantation se traduit dans le concret par la mise à disposition d'une aula de 450 places qui viendra combler une lacune dans l'équipement de la région, par l'aménagement d'une place de parc qui pourra servir de réserve au parking du Centre sportif prévu plus à l'est, le soir et en fin de semaine. Par ailleurs, les places protégées que la loi sur la protection civile nous fait une obligation d'aménager viendront heureusement compléter les abris dont le nombre est nettement inférieur aux normes requises dans ce quartier. Et il faut souligner qu'une partie des abris de ces bâtiments seront aménageables en dortoirs mis à la disposition des sportifs lors de manifestations universitaires ou autres. Enfin, les aménagements extérieurs seront, comme on dit en cinéma «fondus-enchaînés» avec les parcs et promenades de la ville; aucun mur ou barrière ne marquera une «frontière universitaire», au risque de voir quelque chien impertinent venir marquer son territoire sous les fenêtres de nos géographes.

Nous espérons que les décisions politiques qui sont à prendre ne retarderont pas ces constructions et que le Dies academicus 1985 pourra être célébré dans la nouvelle au la. Ces constructions sur les Jeunes Rives marqueront certainement le dernier développement important des bâtiments universitaires ce siècle, si ce n'est une modeste extension — dont le crédit a déjà été voté —pour l'institut d'ethnologie en collaboration avec la ville de Neuchâtel pour son Musée d'ethnographie et un aménagement des bâtiments de la

Faculté des sciences au Mail pour le bénéfice du Centre d'hydrogéologie qui est appelé à une vocation nationale.

La seconde question soulevée en relation avec l'évolution du nombre d'étudiants est celle du nombre des professeurs et des assistants. Le rectorat a pour politique depuis six ans de favoriser la création de postes d'assistants et de limiter la création de nouvelles chaires. Il est intéressant de comparer le nombre d'étudiants par poste complet de professeur ou d'assistant entre les différentes hautes écoles de notre pays. Alors qu'il y a en moyenne suisse 33 étudiants par poste complet de professeur, ce taux est de 22 étudiants par poste professoral complet à Neuchâtel. Si l'on considère qu'un petit nombre d'étudiants est un avantage, alors nous nous trouvons au deuxième rang ex œquo avec l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne derrière la Faculté de théologie de Lucerne qui compte 13 étudiants par professeur. Seules la Haute Ecole de Saint-Gall et l'Université de Zurich ont un nombre d'étudiants par professeur nettement plus élevé que la moyenne nationale avec respectivement 40 et 49 étudiants par poste professoral complet, Pour les assistants — dont le nombre est aussi compté en poste complet — la moyenne nationale est de 12 étudiants par assistant. Neuchâtel est légèrement au-dessus de cette moyenne avec 16 étudiants par assistant. L'encadrement minimum est à l'Université de Bâle avec 34 étudiants par assistant et le meilleur à l'Ecole polytechnique fédérale de Zurich avec 4 étudiants par assistant. Ces données me confirment dans l'idée qu'il serait faux de changer la politique pratiquée ces dernières années; il était juste de s'opposer à de trop nombreuses créations de chaires et d'utiliser les modestes, mais bienvenues, augmentations budgétaires à améliorer le fonctionnement de notre alma mater.

Le dernier thème sera traité beaucoup plus brièvement.

2. L'évolution de la situation économique

Il ne s'agit pas, bien entendu, de présenter une étude exhaustive de ce problème. J'en serais bien incapable. Mais on décèle, ces derniers temps, un changement de vocabulaire chez les commentateurs autorisés. On ne parle plus de crise conjoncturelle, mais de crise structurelle, Si cette analyse est correcte, et je la prends quant à moi très au sérieux, il ne s'agit plus de faire le dos rond, d'attendre que la crise passe en l'analysant et en proposant des remèdes pour qu'elle ne se reproduise plus. Il convient au contraire que les industriels, les syndicats, les pouvoirs publics s'unissent pour construire un tissu industriel nouveau dans la région si touchée de l'arc jurassien. L'Université se doit de participer à

cet effort d'innovation qui est déjà amorcé. Elle peut être le lieu de rencontre où la synergie nécessaire est recherchée dans la sérénité. Elle doit former des étudiants aptes à résoudre les formidables problèmes qui nous attendent. Ses choix seront encore plus difficiles que par le passé.

Ceux-ci sont précisés dans le plan de développement 1984-1987 qui vient d'être ratifié tant par le Conseil rectoral que par le Conseil de l'Université. Cinq domaines y voient leur développement fermement soutenu. li s'agit de l'orthophonie dont le maintien implique une amélioration sensible du programme de formation, du journalisme, de l'informatique, de l'hydrogéologie et de l'économie régionale. Quant à la microtechnique, qui a fait l'objet d'importantes priorités ces dernières années, elle a atteint un premier palier. L'effort accompli ne sera pas relâché quoi qu'il advienne.

Mesdames et Messieurs,

Il me reste maintenant à relater brièvement quelques événements qui ont marqué cette année universitaire. Les Annales 1981-1982 en donneront un reflet fidèle, tout comme les huit numéros du Bulletin d'information en ont annoncé les prémices.

Je dois tout d'abord mentionner, avec une grande tristesse, quatre décès. Eugène Wegmann, professeur honoraire, ancien directeur de l'institut de géologie, nous a quittés après une longue maladie. Notre collègue Manfred Wächter, professeur de gestion de la production, s'est tué accidentellement en montagne, aux Rochers-de-Naye. Mlle Alexandra Schmid, étudiante en ethnologie, s'est tuée dans un accident de la circulation en France et M. Kurt Rumpel, étudiant en biologie, dans un accident de la route à Neuchâtel. Nous garderons un souvenir ému de ces professeurs et de ces étudiants.

Lors du dernier Dies academicus, j'avais à déplorer l'incendie qui, le 16 mai 1981, avait ravagé le bâtiment des instituts de chimie et de métallurgie structurale. J'ai la satisfaction de vous annoncer aujourd'hui que les travaux de remise en état sont terminés, que le bâtiment et les laboratoires sont à nouveau opérationnels. Je tiens à remercier ici les compagnies d'assurances qui, tant sur le plan immobilier que sur le plan mobilier, ont fait preuve de la plus grande compréhension dans le règlement du sinistre, de même que I'Etat, qui par l'attribution d'un crédit spécial a permis d'améliorer très sérieusement la protection anti-incendie du bâtiment, l'architecte qui s'est dévoué sans compter et les professeurs, notamment notre collègue le professeur Tabacchi qui a eu la lourde charge d'établir l'inventaire des appareils détériorés et

le contrôle de leur remise en état. J'associe à ces remerciements tous les ouvriers qui ont oeuvré sur ce chantier ainsi que les étudiants, assistants et collaborateurs qui ont dû travailler durant une année dans des conditions souvent difficiles.

Tout comme en 1981, les étudiants ont organisé une fête à la Cité universitaire le 28 mai de cette année. Le recteur qui y a passé une bonne partie de la nuit regrette de n'y avoir rencontré que peu de collègues. Auraient-ils une telle peur des décibels?

La Fédération des étudiants de l'Université de Neuchâtel qui s'était sabordée au début des années septante s'est reconstituée cette année sous la forme d'une fédération des associations de facultés. Cette renaissance constitue assurément un organe de liaison important pour les étudiants de nos facultés et un sujet de satisfaction pour le rectorat.

L'Université prend aujourd'hui congé officiellement de trois de ses maîtres atteints par la limite d'âge: M. Jean-Louis Leuba, ancien recteur, ancien doyen, professeur de théologie systématique, M. Raymond Jeanprêtre, ancien doyen, professeur de droit des obligations, et M. Pierre Gassier, professeur d'histoire de l'art. D'autres, plus compétents que moi ont déjà eu l'occasion de rappeler leurs travaux et leur carrière et d'en dire les mérites. Qu'ils reçoivent ici l'expression de la gratitude du rectorat et de l'Université.

M. Georges Lüdi, professeur de linguistique générale qui a été nommé à l'Université de Bâle, et M. Alfred Strohmeier, professeur de recherche opérationnelle et d'informatique qui a été nommé à l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne, nous quittent aussi, tout en gardant un enseignement partiel à titre intérimaire.

Mais si d'aucuns s'en vont, d'autres leur succèdent, et je souhaite une cordiale bienvenue aux nouveaux professeurs nommés cette année. Ce sont Mme Lucie Galactéros de Boissier, professeur ordinaire d'histoire de l'art, M. Gerhard Seel, professeur ordinaire de philosophie générale qui succède à M. Philippe Muller, qui avait pris une retraite partielle à la fin de l'année universitaire 1980-1981, M. Nico de Rooij, professeur ordinaire de micro-électronique qui occupe un poste nouveau créé en Faculté des sciences dans le cadre de l'Institut de microtechnique, M. Pierre Bühler, professeur ordinaire de théologie systématique, M. Pierre-Luigi Dubied, professeur ordinaire de théologie pratique qui succède à M. Jean-Jacques von Allmen, qui avait pris une retraite anticipée. M. Henri Quellet, jusqu'ici chargé de cours, a été nommé professeur extraordinaire de sanskrit et de latin; M. Jacques Béguelin, qui enseignait le droit fiscal comme chargé de cours, a été nommé professeur associé.

Ce ne sont pas, bien entendu, les seules mutations intervenues à l'Université, et j'associe à mes souhaits de bienvenue tous nos nouveaux collaborateurs.

Mesdames et Messieurs,

L'année universitaire s'est terminée officiellement le 14 octobre, mais l'année suivante avait déjà commencé quelques jours plus tôt par une session d'examens et par une participation aux activités du Forum économique et culturel des régions. La bulle — pour nos invités, il s'agit de la tente gonflable dans laquelle se déroulent les activités du Forum — accueille chaque lundi soir une conférence présentée sous le titre «L'Université dans les districts». Elle est restée trois semaines à Cernier, elle sera dès lundi 8 novembre à Cortaillod.

Je ne voudrais pas terminer par un spot publicitaire, mais bien par les remerciements que nous devons à nos autorités et à travers elles au pays tout entier. Nous avons si souvent souligné par le passé combien les relations entre les autorités cantonales et l'Université étaient bonnes qu'il est désormais impossible de terminer une allocution rectorale sans le souligner à nouveau, sans quoi on ne manquerait pas d'insinuer que le climat s'est dégradé. Je me félicite donc une fois de plus du climat de confiance qui règne entre «le Château» et l'Université et j'en remercie sincèrement M. le conseiller d'Etat Jean Cavadini et M. Jean-Daniel Perret, chef du service de l'enseignement universitaire.

Je vous remercie de votre attention.

E. Jeannet